Depuis qu'il a fait la rencontre de Luc Besson et de ses productions attardées (cf la trilogie [Taken][1]), la carrière de Liam Neeson a viré de bord; lui qui était pourtant destiné aux grands rôles (La Liste de Schindler pour rester dans ses classiques, les Gangs of New York et Silence de Martin Scorcese pour le reste) s'est rapidement cloîtré dans le sous-genre des films d'action à suspens répétitifs et prévisibles à en crever.
C'est surtout le croisement artistique opéré entre Neeson et Jaume Collet-Serra qui, sur le pourtant bon petit divertissement qu'était [Sans Identité][2], a changé la vision de l'homme sur les films qu'il devait faire pour entretenir sa simple réputation d'acteur américain; comprenons bien que l'art ne permettant pas toujours de payer ses impôts ou son McDo, multiplier les daubes sans pouvoir seulement les compter offre des avantages pécuniaires certains et affirmés.
D'autant plus que les seuls bons films d'action de sa carrière d'acteur vieillissant était dus au suspens et à la maîtrise de Jaume Collet-Serra; [Non-Stop][3] affirmait que le duo était capable des meilleurs divertissements possibles niveau tension et huis-clos, alors que Night Run laissait présager quelques signes d'affaiblissement au niveau du scénario, préférant se concentrer sur une histoire de vengeance parfois trop incohérente pour maintenir l'attention et la tension.
Mais il fallait forcément que la bonne étoile file. Quatrième collaboration entre les deux artistes, The Passenger signe l'arrivée de deux scénaristes inconnus du public n'ayant jamais rien fait ni avant, ni après. Et l'on sent qu'ils sont complètement novices dans l'art de maintenir le suspens par un scénario retors mais surprenant.
Principal défaut de The Passenger, son intrigue se contente de recycler mollement les personnages entrevus les précédentes oeuvres collaboratrices entre Neeson et Serra, reprenant complètement le principe de l'excellent Non-Stop pour l'adapter à la surface d'un train. Premier problème à la démarche : non sincère, elle fait plus preuve d'un manque d'imagination flagrant que d'une volonté de faire un bon film.
Et dans cette volonté de reproduire une recette qui s'épuise à petit feu, les scénaristes participent directement au manque de tension principalement conduit par la mise en scène; si le travail de Jaume Collet-Serra démontrera, pour le coup, un manque d'imagination flagrant caché derrière des artifices de mise en scène banals et des cadrages repris des anciens films du réalisateurs, le développement des personnages aux abonnés absent causera un manque d'identification aux protagonistes attristant, empêchant directement au spectateur de craindre pour le moindre d'entre eux.
Parce qu'au final, on ne craint ni pour leur vie ni pour celle de Neeson; c'est à peine si, une fois passée la première demi-heure et la première hausse de tension, on s'intéresse toujours au pourquoi du comment du scénario. Une fois présentés tous les personnages, on n'a même pas retenu leurs noms, encore moins leur personnalité; le tout continue dans un genre de masse informe et conspirationniste lassant par l'écume des clichés qui se profile toujours plus à l'horizon.
Voyant le mauvais vent se pointer, on craint qu'il prenne cette direction tout en simplicité et en bêtise, multipliant les incohérences sur le principe même du scénario, et soumettant l'idée, de manière involontaire, que tout ce micmac aurait pu être évité si les grands méchants avaient un poil plus de jugeote. On jette finalement les bras au sol quand le plot twist arrive et que l'on connaît l'identité de ceux derrière tout ça, poussant un what the fuck de prévisibilité.
Ce qu'il ne faut pas faire est fait, ce qu'il fallait faire est oublié. On sent un travail forcé, sans aucune sincérité; sur ce point, scénaristes et réalisateurs se rejoignent parfaitement. Si la réalisation et la direction des acteurs démontrera une folle linéarité, l'intrigue se contentera de balancer mollement retournements de situation sur retournements de situation, le tout mené par un Liam Neeson fatigué et sans conviction, qui semble suivre la routine de sa vie de début de film (passage très astucieux, qui plus est) tout du long, sans jamais trouver la force de donner un poil de force à cette oeuvre opportuniste, sans intérêt ni logique. On est loin du premier Taken.