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Christoblog
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2,0
Publiée le 17 janvier 2021
Deuxième film de Hong Sang-Soo, Le pouvoir est un film assez ardu pour ceux qui ne sont pas familier avec l'oeuvre du coréen.
Son premier film (Le jour où le cochon est tombé dans le puits) était une sorte de manifeste dense et marqué par un quasi trop-plein d'intentions. Son deuxième est également un manifeste, mais qui annonce une autre partie de son oeuvre : moins conceptuelle, plus subtile, plus cruelle, plus épurée.
On trouve ainsi pour la première fois une structure en dyptique, assez simple, que HSS réutilisera de nombreuses fois. Les liens temporels entre les deux parties du film (le graffiti sur le palier de la porte, la même scène de train) sont subtils et mêmes parfois presque surnaturels (le poisson rouge qui disparaît dans la deuxième partie est-il l'animal qu'enterre Ji-Sook dans la première ?). Hong pose ici des jalons de sa réflexion sur le temps et les coïncidences qu'il approfondira par la suite.
Le pouvoir est aussi marqué par le désespoir et la présence omniprésente de la violence : harcèlement, assassinat de la femme dans la montagne, pulsion de suicide, corruption pour obtenir un poste, dispute en tout genre, crise soudaine de colère, avortement traumatisant. Sous ses dehors légers et son air "de ne pas y toucher", le cinéma de Hong remue ici les immondices de l'âme humaine, mais il le fait avec distinction.
La structure du film est toutefois un peu lâche et l'ensemble peut sembler manquer de cohérence. Il est en tout cas pour moi moins riche que Le cochon, moins subtil que La vierge, et globalement moins maîtrisé que le reste de l'oeuvre de HSS.
C'est enfin peut-être le film le plus noir de son auteur, puisqu'ici aucun sourire ne vient adoucir le noir tableau de la condition humaine qu'il dessine.
Dès les premières images, Hong impose un style de cadre et de couleur et fascine aux premiers instants. Avec un naturel enthousiasmant, lui et ses acteurs livrent une chronique à la fois déconcertante et fascinante. Dans un rythme extrêmement lent (pour ainsi dire inexistant), le réalisateur décrit sa chronique tel un peintre, en prenant son temps, en le dénuant de toute superficialité. En s'effaçant derrière la réalité de ses images, il s'impose paradoxalement en tant qu'artiste à part entière. Il prend un malin plaisir à croiser son récit, mais l'on peut regretter que sa deuxième partie faiblisse parfois dans des redites et des égarements?
S'il ne manque pas d'intérêt ni d'audace, que ce soit dans la narration ou la mise en scène, Le Pouvoir... est cependant très abscon et moins marquant que les autres films du cinéaste. Réservé aux puristes, en quelque sorte...