Rafi Pitts, 43 ans, appartient à une nouvelle vague de cinéastes iraniens qui a peu à voir avec la génération plus ancienne, celle des Kiarostami et Makhmalbaf. Pitts a 4 longs-métrages à son actif, dont un seul, Sanam, a été distribué en France, sans marquer les esprits. The Hunter est d'une toute autre trempe. Un film âpre, épuré à l'extrême, chiche en dialogues -Pitts a privilégié la bande son-, et dont la dernière partie, la plus prenante, est à mi-chemin entre le thriller et le western. Dans un format minimaliste, s'entend. Qu'un scénario pareil, l'histoire d'un homme dont l'épouse et la fille sont mortes au cours d'une fusillade pendant une manifestation contre le régime et qui tue à son tour, ait pu passer le barrage de la censure est assez sidérant. Le film, lui, est interdit de diffusion en Iran, mais il circulera largement sous le manteau, pas de doute là-dessus. Le personnage principal, ce chasseur pourchassé, est interprété par le réalisateur lui même. Sa prestation, tout en froncements de sourcils, n'est pas très convaincante, au diapason d'une interprétation globalement maladroite. C'est le talon d'Achille d'un film très réussi visuellement et qui, avec une trame plutôt mince, installe une tension de plus en plus sourde, que les ellipses et l'absence d'explications renforcent encore. Si le pouvoir des mollahs n'est pas visé directement, on entend leurs discours à la télévision et à la radio, comme une sorte de fond d'ambiance, subtile évocation d'une dictature religieuse inique (pardon pour le pléonasme). Il faut se laisser happer par ce film lent et viscéral, il en vaut vraiment la peine.