Si on notait les films proportionnellement à leur budget, je serais moins large. Je note celui-ci sur le simple plaisir pris à le regarder. Pas nul, donc. Avant de le visionner, je n'en attendais rien de spécial à part un bon petit spectacle : A vrai dire, moi, le Seigneur des Anneaux, par moment, j'ai trouvé que c'était à bâiller - et par moment captivant, mais une trilogie longue de près de dix heures, forcément, ça en fait des "moments" et même si j'ai pas spécialement été scotché tout le long, au moins, ça a eu fait plaisir à des millions de lecteurs de Tolkien...
Ici, dans "Mortal Engine", pour moi, ça pêche par raccourci, tout à l'inverse du Seigneur des Anneaux :
Là où j'avais trouvé les longs combats quand-même plutôt inspirants dans LOTR avec des rebondissements dynamiques, tactiques, ou stratégiques, ici tout semble copié en bâclé d'autres films datés ( Tel que Star Wars déjà évoqué à juste titre dans nombre de critiques Allociné ) - C'est donc télécommandé "de longue date"... Pire, en fait, parce que moins bien fait... En effet, c'est parfois extrêmement peu vraisemblable en terme de rapports de force ; Je pense aux combats de fin en particulier. ( Ouais, y a des combats à la fin de ce film, mais je pense que vous n'êtes pas trop spoilés de le savoir ? ).
A contrario, là où j'avais trouvé que certaines séquences s'attachaient trop longtemps aux larmes qui dégoulinent sur des sourires complices et autres niaiseries entre hobbits, j'ai trouvé là que par moment les raccourcis relationnels frôlaient le ridicule.
La relation entre les deux fugitifs - qui débutait bien dans un petit antagonisme de circonstance certes classique mais toujours charmant - est trop vite cousue de fil blanc et perds du coup toute saveur rapidement en route...
La relation extraordinairement fugace entre la petite noble et l'ouvrier mécano passe en 2 séquences du "je-ne-t'avais-jamais-remarqué" à "je-te-fais-aveuglément-confiance-alors-que-tout-devrait-m'inviter-au-contraire & toi-aussi-tu-fais-pareil-on-est-copains-c'est-parce-qu'on-est-des-gentils" (bioman-style, comme certains combats).
Ainsi de suite pour le gérant du musée et d'autres personnages insipides aux actions peu vraisemblables au regard des risques qu'ils prennent subitement pour aller dans le camp pourtant partant quand-même pas mal perdant des "gentils".
Au fait, à la toute fin, on voit bien la princesse blondie, qui vient quémander au nom de tout un peuple- ce même peuple qui était mort de rire unanimement quelques heures plus tôt en regardant ceux d'en face brûler par dizaines de milliers ( à l'exception du seul gérant du musée qui levait un sourcil ) - Ah... La courageuse petite aristo qui vient à la fois faire rédition du jour au lendemain et demander l'asile pour tout ce beau monde vachement moins haineux d'un coup... Mais quelqu'un sait ce qu'il est advenu du mécano ? En fait, c'est même pas ironique au début, le fait que personne ne le remarque... ? Non, parce qu'à la fin personne ne remarque non plus qu'il n'est plus là... J'ai quand-même bien les boules pour lui ! Surtout que je me demande comment ces villes mouvantes auraient pu bouger sans un unique technicien comme lui ultra-dopé pour tout faire... C'est pas grave... Donnez le beau rôle à la princesse blonde aux yeux bleus taille mannequin qui bouge les foules par sa pensée, et zappez complètement le prolétariat, ça nous changera...
Pourtant, ça partait prometteur à mes yeux sur les persos, le début du film avait au moins le mérite d'être suffisamment rationnel pour que les personnages, n'échappant certes pas aux clichés, semblent avoir chacun leur dimension propre et donc peut-être, justement, avoir une occasion d'échapper aux clichés ( mais intelligemment, parce que c'est justement là qu'eut été le challenge )... Sauf que c'est pire que ça... Le problème ne sera même pas que ça restera "entendu", et de façon pas mal embourgeoisée vu ce que nous montre la caméra, pour des cités steam-punk ayant besoin d'un sacré paquet d'ouvriers pour tourner mais qu'on ne voit jamais ( même si on devine assez vite comment les bourgeois au centre de l'Histoire les obtiennent certainement ) ....
C'est pas juste "entendu", c'est carrément que la plupart des personnages présentés au début perdent leur intérêt en cours de route et ne serviront plus ensuite que d'excuses scénaristiques : En effet, certains très présents initialement disparaissent ensuite et ne reviennent que pour donner un sentiment de bâclé et de parfaite inutilité dans le récit, quand d'autres n'apparaissent que longtemps après le début dans le flot de l'action, et vont jouer des rôles déterminants, quoique prévisibles - de seconds couteaux faciles à sacrifier - et ça, sans qu'on n'ait jamais le temps de saisir réellement tous leurs enjeux et de se les approprier, bref de s'attacher à eux, surtout donc qu'on sait immédiatement qu'avec leur carte de pas-tout-à-fait-VIP ils feront très probablement partie des "gentilles" victimes, en gros, de faire-valoir de héros déjà devenus inintéressants à ce moment-là.
Quant aux enjeux de société, même en mettant de côté l'évidence que ces cités mécaniques sont une impossibilité technique - il faut évidemment à la base prendre le parti pris que cela est comme une caricature onirique, métaphorique, pas le portrait réaliste d'un avenir lointain... - Il y a peu à se mettre sous la dent, politiquement parlant, avec cette seule théorie du "Darwinisme Communal" qu'on aurait bien envie d'associer à une forme de prédation nationaliste, mais à part ça... La société qu'on nous y montre a quand même l'air beaucoup plus homogène sur son soutien au Pouvoir, qu'elle ne semble l'être dans son côté bigarré ( costumes, activités, etc
En gros, beaucoup de formes et de couleurs, mais très peu de fond, et aucun soucis de réalisme fonctionnel, au-delà de l’invraisemblable postulat même des cités mouvantes que l'on pourrait accepter par seul plaisir imaginatif... Alors pourtant que de fausses promesses sont distillées par les visuels du début : Religion ? Autoritarisme ? Protectionnisme ? Environnement ? Classes sociales ? - Non, rien de spécial à réfléchir, c'est très creux quand ce n'est pas grassement consensuel ( "le pouvoir "peut" griser, et "la guerre c'est mal" - je ne m'inscris pas en faux, mais ça peut être plus subtile pour illustrer les mêmes choses, voire aller plus loin, parce que bon, ça, c'est quand-même limite des postulats de base ! ).
...Bon, à part peut-être une vague et brève tentative - à moitié dissimulée - d'illustrer comment la guerre amène son cortège de réfugiés accueillis par les uns comme une ressource à exploiter ( encore qu'on ne les verra jamais au travail forcé, limite on se demande s'ils vont pas directement dans les beaux quartiers en sortant des files d'attente ! ) ...Ou accueillis par ailleurs par "zenitude" humaniste ( et là encore, ne vous méprenez pas : Vive l'humanisme... Mais on a eu fait plus subtil, là encore, pour donner envie d'y croire ! ...Là, sur la fin, c'est tellement gros qu'au fond, ça donnerait limite des boutons et qu'on aurait presqu'envie de devenir anti-humaniste juste par réaction. J'ai dit presque, hein, calmez-vous les Brexit-fan-boys ! ).
Du coup, au final, au niveau des personnages principaux, comme au niveau du réalisme en background, on a un peu des playmobil dans des cités lego qu'un enfant de 4 ans ferait exploser en les jetant les unes contre les autres avec Maman & Papa qui filment fièrement et sont quand-même là pour lui rappeler qu'il faut des repères moraux, mêmes s'ils ne savent pas trop lesquels... Les playmboils aussi ont le droit au respect ? Même les playmobils ouvriers ici peu représentés ? ...Ou exilés à cause de la guerre ( économique, ce qui est de toute façon un pléonasme ) ? Oui, même ces "gens-là" devraient avoir un quota de représentés dans les boites playmobil - trop chères pour que ces derniers ne puissent les acheter à leurs enfants - ou dans les films, dont les places de cinéma sont aussi trop chères pour eux, de nos jours.
Ah ! ces films auto-centrés sur une certaine classe sociale, réalisée par et pour elle... Et qui vient parfois nous parler de "télé-réalité" au sujet d'émissions à bord de villas ou de yatch de milliardaires. "Télé-réalité". Et ça c'est du "cinéma SF-réalité" alors ?
Certes, ce n'est pas si mauvais non plus : Sur les visuels, l'originalité et le travail de CGI ont été suffisant pour que je kiffe un certain nombre de plan-séquences, comme devant un joli tableau, mais animé... Et le début m'a même permis d'entretenir une petite demie-heure le fantasme que je serais peut-être surpris par la suite avec les personnages que l'on me proposait... Même si je ne l'ai pas été, du coup, au moins j'avais envie de regarder pendant un moment...
Un peu moins après 1/2 heure... Carrément plus du tout, à la fin, tant c'était ultra-prévisible, et inintéressant à tout point de vue.
Au bout du compte ? Pour moi, ce n'est pas nul, il y a une certaine esthétique, et des velléités initiales de bien faire, mais ça manque quand-même largement sa cible à la fin... N'importe quelle cible, en fait... Avec pourtant une arme de destruction massive qui a coûté des dizaines de millions de dollars à produire et en rapportera probablement encore davantage dans les gigantesques cinéma où le pognon des classes moyennes sera raflé ! ...Or, on ne m'enlèvera pas de l'idée, que plutôt qu'un film médiocre qui ne fait même pas rêver, ça en aurait fait, tout cet argent mal dépensé, de quoi accueillir de VRAIS réfugiés, pas en plastiques, dans la VRAIE vie, de façon un minimum digne et décente - C'est donc, pour moi, un film finalement aussi médiocre que le cœur de la société humaine qui a permis qu'on le produise, qu'on le diffuse et qui encourage à payer pour aller le voir, le temps d'oublier une réalité qu'on pourrait rendre facilement moins laide que ce film...