Voilà un grand film, encore un, de Steven Spielberg. Tout commence par des jeux de lumière et des paysages absoluments magnifiques ; prenons le plan de l'entrée de la ferme, un espace constitué par le chemin, une barrière en bois rabbattue sur le côté droit, éclairée par une lumière identique à celle du paysage en arrière-plan, un étalonnage orangé bonifiant le tout...la lumière et l'étalonnage incroyable de Janusz Kaminski, encore une fois...tantôt joli et paisible, tantôt extraordinairement contrasté lors de la course du cheval, filmé par plusieurs travelling, d'effets pyrotechniques et de placements de figurants incroyables, le tout dans un décor de guerre...voila un art contrôlé par l'imagination illimité de Steven Spielberg, rendue possible par son équipe technique bien dirigée. C'est avant-tout ça, d'être un bon realisateur, un bon chef d'orchestre, savoir proposer, mais savoir aussi écouter et choisir ce qui est bon et ne l'est pas pour une séquence, et dans celle-là, comme dans le film, tout l'est. Steven Spielberg maitrîse encore et toujours très bien aussi l'art du dialogue de ces plans, ces questions-réponses subites en fondu d'un plan à l'autre ; je parle ici de la sequence difficile et rabaissante pour Albert Narracott (Jeremy Irvine) et sa famille, lorsque le propriétaire Lyons je crois (David Thewlis) blague sur leur bêtise, et que la mère Rose (Emily Watson) retourne à son tricot, nous avons le droit à un sublime et lent travelling sur le tricot, un travail de main, ou les rangs de ce dernier donne réponse au labour du terrain que le jeune, téméraire et méritant Albert va réussir. Le film a aussi et surtout plusieurs messages, il parle explicitement de ce sacrifice animal de la Première Guerre Mondiale de presque dix millions de chevaux entre la France et la Grande-Bretagne pour une guerre de l'Homme, il parle bien sûr de la guerre vu par les animaux, qui ont subi aussi, eux la perte de leurs proches et ils sont donc ici personnifiés et très bien dressés car nous n'avons aucun mal, par les champs/contre-champs de Steven Spielberg à comprendre leurs émotions. L'autre message implicite, qui est toujours inhérent aux chevaux (animaux) dans ce film est le fait que ces chevaux passent entre les mains de personnes humaines, ayant un coeur, qu'ils soient anglais, français pour Emilie (Celine Buckens) et le grand-père (Niels Arestrup), ou même du côté allemand avec celui qui s'occupe des chevaux et donne un peu de paix au cheval noir avant d'ordonner à Joey de s'enfuir avant d'avoir le même sort, ou ces deux jeunes allemands, victimes d'une guerre et d'une promesse qui n'ont montré que de la sollicitude envers ces animaux. Et par cette idée nous pouvons comprendre plusieurs messages ; le premier étant que dans chaque armée il y a eu des hommes qui n'avaient pas de volonté belliqueuse, qui étaient juste contraints par leur pays d'aller au front (comme cette scène magnifique de la libération du cheval), le second étant que les hommes au bon fond sont reliés d'une manière ou d'une autre aux animaux et qu'un personnage se comportant bien avec l'animal est estimé. Un film donc humain et tristement magnifique.