Au moins Lin Manuel Miranda a le mérite de ne pas passer par quatre chemins pour asséner son message. S'intégrer c'est ne pas oublier ces origines. Certes, mais a t'on vraiment le choix ?. En regardant de plus prés, il n'y avait pas non plus un seul gramme d'originalité dans l'arc narratif, dans la morale ou dans la chronologie de la comédie musicale, et donc logiquement il en va de même du film, intégré comme une pièce montée romantico-populaire, hyper maniériste, se juxtaposant à l'énérgie popa cubaine du spectacle de broadway, Miranda et Chu ont décidé de s'entendre sur l'essentiel, faire tourner le sempiternel moulin à la gloire du chez soi... Mais bon on ne va pas reprocher à Miranda d'écrire beaucoup et donc d'écrire assez platement. Bizarrement l'originalité vient de la mise en scène de Jon Chu. Ce faiseur d'images sexys et mouvementées (les Sexy Dance...) s'était fait un nom avec son crazy rich asians, improbable crépis d'une aristocratie chinoise en mal de respectabilité. Dans cet opus une jeune avocate américaine, tombe amoureuse d'un trop riche chinois et fait face à la tradition retrograde d'une bourgeoisie totalement décompléxée. Mal des origines, intégration, lutte des classes (!!!) et union incertaine sont des éléments qu'on retrouve dans l'adaptation. Les images de Chou, parfois génantes (rayons improbables, incrustations bizarres dans la scène de la piscine, ciel numérique inutile, montage vite fait), sont aussi du coup vraiment surprenantes. Elles semblent saisir et recolorer le bordel ambiant. Rose, cépias, couleures trop chaudes, été blanc, elles offrent belles et pénibles surprises, un peu à la manière d'un technicolore sans limites. Evidemment la dance sur les murs de benny et Nina est le grand moment du film. La chanson de la grand-mère offre sans doute le meilleur passage de ce qu'immigré veut dire. 5 minutes où à la seule phrase, "j'ai passé ma vie à vivre les rêves que j'ai hérité de toi", nous sommes saisis des fantômes du passé et de toute une génération qui cherche à passer un flambeau, mais lequel ? Là où Linn Miranda n'a pas grand chose à nous dire, au moins les images de Mr Chou creuse un intéressant kaleidoscope visuel qui laisse passer trouble ambiguité, et malaise.