Il commence à se faire vieux ce film quand même, mais il est toujours un petit divertissement efficace.
Il repose bien sûr sur son duo d’acteurs, ici néanmoins dotés de personnages pas terribles. Gere en héros d’action rugueux semble un peu moins à son aise que d’habitude, et même s’il sauve la baraque, on ne peut pas dire qu’il trouve là un rôle bien mémorable qui aurait plus judicieusement revenir à un spécialiste du genre. Quant à Basinger on ne peut pas dire qu’elle soit véritablement utilisée, et l’actrice aurait pu s’appeler Jeanne Dupont (et être pas mal foutue) que la situation n’aurait pas changé. L’actrice au-delà du rôle est tout de même trop transparente. Finalement il faudra plutôt se rabattre sur les seconds rôles pour ce faire plaisir, avec un méchant très méchant, très sobre aussi qui se débrouille bien, et quelques autres figures assez piquantes, notamment William Atherton, qui a décidément souvent des rôles de têtes à claques (enfin au moins dans les années 80).
Le scénario est surtout prétexte à un divertissement aventureux teinté d’un soupçon de drame. Honnêtement j’ai trouvé l’ensemble un peu lâche. Il y a de bons moments qui alternent avec des passages nettement plus banals, et on a le sentiment que Sans pitié alterne entre le vrai film de cinéma (le passage dans les bayous, le final déjà clairement plus soigné) et petite série B roublarde et violente comme les années 80 les aimées bien. Par ailleurs on ne peut pas dire que l’intrigue soit époustouflante, ni que le suspens étouffe le film, tant il est bâti de manière prévisible. En sommes Sans pitié marche sur un sentier bien balisé, s’en écarte peu, et ne pourra compter sérieusement que sur son environnement pour surprendre le spectateur d’aujourd’hui.
La réalisation est propre, mais pas exceptionnelle du tout. Il y a des passages brouillons (celui dans le port avec la voiture) qui alternent avec de bonnes choses (le final), et globalement Pearce applique une recette simple qui ne permet pas d’audace à Sans pitié. Ça manque de génie, et c’est d’autant plus dommage que les décors se prêtaient à de vraies ambitions. Ces derniers en effet sont l’attraction du film, avec une plongée à la Nouvelle Orléans, où l’on visite des quartiers à l’atmosphère très spéciales, les bayous, bref un environnement dépaysant et trop peu exploité dans les films américains, ce qui est regrettable. Et si la réalisation est moyenne, en revanche la photographie ne manque pas d’allure, et il y a des choses très esthétiques, avec évidemment l’usage très eighties des éclairages aux néons fluos, qui donnent tout de suite une ambiance spéciale. La musique est aussi très agréable. Elle est signée d’un bon compositeur qui non seulement parvient à suivre à l’aise le métrage, mais à lui amener un peu d’émotion, avec un thème très doux et un peu triste.
Au bout du compte je donne 3 à ce film. Il se regarde avec un certain plaisir, et il a des qualités à faire valoir, mais il déçoit quand même par un coté trop terre à terre, trop facile, qui l’empêche de vraiment s’élever au-dessus du lot. Dans un genre un peu approchant Black Rain avec Douglas est mieux fait, plus ambitieux, et il exploite mieux ses atouts.