The Master suscitait une certaine curiosité, réjouissance, à la veille de sa sortie en salle. Oui, après le très beau travail de Paul Thomas Andersson durant sa carrière de cinéaste, jusqu’alors, et la promesse de performances d’acteurs éclatantes, notre appétit de cinéma, le vrai, étant aiguisé. Malheureusement, ce qui arrive parfois aux grands artistes arrive à Andersson. Le bonhomme s’est encoubler sur un monceau de bonnes idées, se perdant dans un marasme idéologique, en oubliant dans son élan qu’un film se doit de raconter une histoire, quelque soit le chemin emprunter. Si le film commence bien, nous questionnant sur la suite, le deuxième partie fait figure d’iceberg à la dérive sur un océan d’inconnu, même pour celui qui est censé raconter l’histoire, réalisé son œuvre.
Oui, bluffés que nous sommes par les prestations respectives de Joaquin Phœnix et Philip Seymour Hoffmann, accessoirement d’Amy Adams, le déclin d’un film qui avait de quoi impressionner est d’autant plus brutal. La première partie est captivante, la deuxième, à la limite de la suffocation tant tout intérêt disparait comme neige au soleil. Ceci est encore plus regrettable du fait de la maîtrise lyrique de la mise en scène d’Andersson, qui pour ce qui est de la reconstitution d’une époque, en épatera plus d’un, dans les tronches des quidams, dans les vêtements et décors. Oui, jamais acteurs n’auront été si bons pour si peu. Un film qui s’est perdu en route, qui à perdu tout son potentiel récréatif, informel, l’heure de visionnage passée.
La folie de Joaquin Phœnix est palpable, admirable à l’écran. L’on aurait dés lors aimé le voir se transformer réellement sous l’emprise d’un maître qui perd autant d’amplitude que le film lui-même à force d’user de théories sans aboutissants. Si la Cause, par analogie la Scientologie, secte athéiste à la mode, semble ici puiser son inspiration dans le paranormal, les théories vaseuses du maître ne font jamais mouche, ne laissant seulement que des traces de réflexion alors que le sujet dérive au loin. Certaines séquences de travail avec Freddy, le personnage principal, sont certes captivantes d’intensité mais ne laissent aucune marque dans le récit, ne servant qu’à démonter les talents de metteur en scène d’Andersson sur une mesure purement technique.
Aboutit visuellement, offrant des performances d’acteurs hors du commun, aussi sur l’aspect physique pour Phœnix, mais qui ennuie profondément dès l’instant ou le public capte le fait que ce long métrage ne lui apprendra rien, ne lui apportera rien. Le final est par ailleurs à ce point risible que l’on s’interroge sur une erreur éventuelle de montage. Déçu est ayant la nette impression d’avoir perdu mon temps, je m’interroge sur la nécessité d’un cinéma trop hautain pour ses créateurs. Perdu par un sujet qu’il n’aura su maîtrisé, Andersson démontre que tout cinéaste à ses limites, même si son travail technique est colossal, son sens de l’image magique et sa direction d’acteurs formidable. A méditer. 05/20