Paul Thomas Anderson reste un maître du cinéma, même si The Master n'est pas, sans aucun doute, le meilleur de ses opus. Pas aussi éblouissant que Magnolia par exemple.....
Tout d'abord, revenons sur le retour du plus beau, du plus sexy bec de lièvre du cinéma, je veux parler bien sûr de Joaquin Phoenix. Incarnant ici Freddie Quell, revenu de la guerre du Pacifique avec une case de vide -on se demande si elles étaient toutes bien pleines avant. Quand on le voit voûté, déjeté, la poitrine creuse, les épaules tombantes, le visage agité de tics, on pense à Robert de Niro époque actors studio, et on se dit que le Joaquin en fait beaucoup pour incarner le mec à problèmes, et puis on s'apperçoit qu'il a réellement la tronche en biais, avec un côté comme paralysé, qu'il est réellement tout de traviole, et on se demande ce qui est arrivé au beau Joaquin depuis Two lovers? Il ressemble maintenant à un Billy Bob Thornton légèrement mâtiné de Denis Hopper. Pas très appétent, donc....
Après ce préambule frivole, venons en au film. Freddie, ce parfait paumé, rencontre Lancaster Dodd, gourou d'une petite coterie appelée "La Cause", et qui se prétend médecin et physicien nucléaire. Écrivain aussi, d'un livre qui présente sa méthode. Philip Seymour Hoffman, plus gras, plus onctueux, plus faux jeton que jamais, est prodigieux! Entouré d'une famille (récente épouse, enfants issus d'unions précédentes) qui le porte aux nues et d'un petit cénacle d'hystériques énamourées (Laura Dern), il se produit dans des petites salles et des salons où, au moyen de l'hypnose, il fait revivre à ses patients leurs existences antérieures. Freddie devient son chien de garde (incontrôlable et capable de se jeter comme un enragé bavant sur toute personne ayant critiqué le Maître...) et son cobaye. Il expérimente sur lui sa thérapeutique d'échanges directs avec un questionnaire répété, ressassé jusqu'à épuiser le patient, il le soumet à des expériences psychologiques des plus douteuses, cependant que la famille fait part de sa méfiance: ne serait il pas un espion? Mais non, le bon Lancaster veut absolument guérir son ami. La relation bizarroïde entre les deux hommes est au centre du film.
Freddie s'enfuit. Quand il reviendra vers ce Maître dont il ne peut se passer, celui çi aura écrit un autre livre moins radical que le premier, fait fortune, créé une école avec petits étudiants en uniforme et disposera de bureaux imposants. La "Cause" a réussi...
On pense évidemment à Ron Hubbard, mais de loin: en fait, le film ne pose jamais la question sérieuse: comment devient on le puissant gourou du développement personnel? Anderson n 'est pas un cinéaste à thèse. Ce n'est pas Sydney Lumet! C'est un homme de cinéma brillant, virevoltant, ironique, et c'est en cela qu'on reste un poil sur notre faim, même si on éprouve beaucoup de plaisir. Film long, encore? Oui, mais là on ne voit pas le temps passer.....