Depuis la sortie de "There Will Be Blood" en 2008, film misanthrope mené par le génial Daniel-Day Lewis, suivant le parcours d'un magnat du pétrole, on attendait fermement Paul Thomas Anderson. "There Will Be Blood" était un film réussi et excellent aussi bien sur le côté technique (ah ces travellings!) que sur son histoire. Anderson allait-il faire mieux ou moins bien? Réponse: égalité! "The Master" est tout aussi génial que son prédécesseur, même si les deux films n'ont rien à voir entre eux. Si "There Will Be Blood" lorgnait plus du côté de la grande épopée américaine aux avants-goûts de western, "The Master" réside dans le psychologique et uniquement dans le psychologique. Après la Seconde Guerre, Freddie Quell (Joaquin Phoenix de retour après son faux arrêt de carrière et son documenteur "I'm Still Here") un vétéran des Marines complètement cinglé, alcoolique et violent, revient faire sa petite vie aux Etats-Unis. La première partie du film s'étale en effet sur ce personnage pendant une bonne vingtaine de minutes et par le biais de plusieurs saynètes mettant en avant la folie du personnage, âme torturée. Rien de bien profond durant la première vingtaine de minutes, mais de cette façon, Paul Thomas Anderson instaure au spectateur ce dont quoi le personnage de Freddie est capable et par la même occasion le background du film. Background qui ne sera que présent intégralement lorsque Freddie se retrouvera sur le bateau d'un gourou, Lancaster Dodd (Philip Seymour Hoffman de retour chez Anderson), dirigeant "La Cause". Petit à petit, un jeu d'influence s'installera entre les deux personnages et c'est sur cette influence que sera centré le film. Autant prévenir, "The Master" est un film déroutant est pouvant déranger tant la mise en scène d'Anderson plonge le spectateur comme si il était membre de la secte. On se laisse aisément manipuler par Dodd en même temps que Freddie (voir la séquence hallucinante des questions/réponses) et c'est sur ce point qu'Anderson met l'accent. Chaque être humain, aussi perdu qu'il est, cherche à se rattacher à plus puissant que lui. Exemple de Freddie, rongé par la folie, qui pour survivre suis aveuglément le "Maître". Du moins dans un premier temps,
avant qu'il ne devienne incontrôlable et qu'il finisse par suivre sa propre voie.
"The Master", à l'instar de "There Will Be Blood", est un film misanthrope aussi, critiquant vivement le genre humain et sa capacité à se laisser manipuler. Au final, Paul Thomas Anderson réussi une nouvelle fois son coup et nous livre un film maîtrisé et passionnant, dont le seul défaut est parfois de tomber dans le trop manichéen, notamment au niveau du comportement des personnages (celui de Freddie en tête). Il ne reste plus qu'à attendre le prochain Anderson maintenant...