Un drame grandiose,d'une ambition invraisemblable,qui ne livre jamais la clé de son sujet,et se laisse aller à des débordements mystiques et auteuristes.En fait,c'est assez simple du point de vue du spectateur.Soit il décroche rapidement,lassé de la complexité psychologique du film et de sa mise en scène très frigide.Soit il est captivé,fasciné,frappé par la maîtrise ébouriffante de Paul Thomas Anderson,le plus grand des cinéastes américains contemporains,héritier de Kubrick et Altman."The Master" parle en premier lieu de l'attraction/répulsion entre deux hommes décalqués dans l'Amérique des années 50,celle de l'immédiate après-guerre.Leur relation,toxique,étouffante,est tordue.On ne sait pas trop qui manipule qui?Le marin ravagé,alcoolique,aux accès de colère impressionnants.Ou alors ce gourou charismatique et éloquent,qui semble croire dur comme fer à son baratin de charlatan?Quoi qu'il en soit,P.T Anderson,même s'il s'en défend,traite bel et bien de la naissance de la Scientologie.Ce culte,cette secte aux croyances perchées(complot planétaire,extra-terrestres,matérialisation de la pensée...).Anderson n'explique rien,préoccupé qu'il est à tirer la quintessence de sa réalisation en 70 mm,avec une reconstitution bluffante d'époque.A ce titre,la signification de certains de ses plans est à enseigner au plus vite dans toutes les écoles de cinéma.Malgré un manque de liant entre toutes ces séquences étourdissantes et une émotion étouffée dans l'oeuf,cette 6ème oeuvre de PT Anderson marquera son temps.Un mot enfin sur les prestations stupéfiantes de Joaquin Phoenix,émule félin et colérique d'un Brando;et de Philip Seymour Hoffman,érudit,râpeux,d'un cynisme à toute épreuve.