« Jappeloup », projet cinématographique le plus personnel du français Guillaume Canet, crédité ici scénariste et acteur principal, il y a lieu de se poser la question. Réalisé par le canadien Christian Duguay, « Jappeloup », écrit des seules mains de Mr Marion Cotillard, est librement inspiré de la vie et du parcours sportif de Pierre Durand, mais aussi de celle de Guillaume Canet. Certains l’ignorent en effet, mais ce dernier se destinait plutôt à une carrière de sportif côté cheval, avant que le destin – et son père – choisissent à sa place en le dirigeant vers une brillante carrière de comédien / metteur en scène. « Jappeloup » présente plusieurs défauts, ne le cachons pas : problème de rythme tout d’abord, avec une première partie mollassonne, contrebalancée par une seconde moitié bien plus en jambes ponctuée par les différentes compétitions, alternant les échecs et les incroyables victoires, comme dans toute itinéraire de grand champion. Ensuite, il faut blâmer le ton de « Jappeloup », entre le biopic pur réalisé à l’Américaine, le long métrage franchouillard (la bande-annonce nous faisait d’ailleurs un peu peur) et le film sportif tendance « L’Enfer du dimanche », « Jours de tonnerre » ou « La Légende de Bagger Vance » pour ne citer qu’eux, un peu pataud dans l’équilibre entre ces genres. Pourtant, il faut avouer qu’un certain charme opère. En premier lieu, grâce au casting particulièrement bien senti. Guillaume Canet se montre à son aise et crédible en Pierre Durand, probablement du fait des nombreuses similitudes entre les histoires respectives des deux hommes. Daniel Auteuil, sans livrer sa meilleure prestation, est juste et cohérent dans son incarnation du père de Durand, source d’inspiration en quelque sorte de son sportif de fils. Leurs relations, particulièrement touchantes, recèlent la sincérité et la volonté de plaire. Les deux comédiens sont entourés de seconds rôles au cordeau, Tchéky Karyo en coach pourri jusqu’à la moelle – type qu’il interprète toujours avec brio – à Marina Hands, honnête épouse du prodige, ou encore la révélation Lou de Laâge, très jolie groom du cheval « Jappeloup ». Jappeloup, parlons-en. Personnage à part entière, le cheval est divinement filmé par la caméra de Christian Duguay et apparaît, à la manière du « Cheval de guerre » de Spielberg, réellement émouvant et esthétique. Christian Duguay, l’homme à la barre de l’oubliable « L’Art de la guerre » avec Wesley Snipes et de plusieurs épisodes de TV show us, épaulé d’une belle photographie, filme avec panache cette aventure, magnifiant la réalité en fiction, et tient en haleine son public jusqu’au bout grâce à des scènes de compet’ galvanisantes, en dépit d’une accumulation de ralentis inutiles. Bilan : Il ne fait pas bon vivre d’être un cheval en ces temps moroses de scandales médiatiques sordides, référé les récentes unes des journaux télévisés. Cependant, l’équestre « Jappeloup » est une histoire poignante, bien écrite, très cinématographique, qui a tout pour séduire.