Avec son Godzilla vs. The Sea Monster, le réalisateur Jun Fukuda était revenu aux fondamentaux de la saga et du Kaiju eiga en général. Préférant délaisser la science-fiction pour nous livrer un simple combat de titans dans la pure tradition du genre. Offrant aux fans un film non sans défauts (comme toujours dans ce type de divertissement) mais plutôt appréciable. Le cinéaste récidive donc avec un nouvel opus qui, rien qu’en voyant le titre, peut faire craindre le pire !
Le Fils de Godzilla… Du moment qu’une figure culturelle emblématique se voit affubler d’une progéniture, ce n’est généralement pas bon signe en ce qui concerne la qualité de l’œuvre (Le Fils de la Panthère Rose, Le Fils de Frankenstein, Le Fils de Chucky, Le Fils du Mask, Le Fils de Kong…). Il ne restait plus qu’à espérer que Fukuda, son équipe et la société Toho délivrent un projet aussi exploitable que le film précédent. Et franchement, en voyant le résultat final, c’est ce qui s’appelle avoir le cul entre deux chaises !
D’un point de vue technique, Le Fils de Godzilla fait aussi bien que The Sea Monster. D’accord, encore une fois, les effets spéciaux ont pris énormément d’âges, et cela se voit beaucoup dans les costumes en latex et les défauts récurrents des vieux Kaijus eiga (mauvaise synchronisation sonore, faux raccords…). Mais pour un long-métrage datant de 1967, et pour un faible budget, il est appréciable de voir que les effets visuels tiennent la route. Que ce soit les décors en miniatures (maquettes) qui se révèlent être de plus en plus crédibles, les incrustations à l’écran (un monstre géant ajouté sur le même plan qu’un personnage humain) ou encore les nouvelles créatures qui apparaissent dans cet opus pour la première fois, animées convenablement (les mantes Kamacuras, l’araignée Kumonga). Permettant au film d’offrir un sympathique combat entre Kumonga et Godzilla… ce dernier étant aidé de Minilla…
La grosse erreur du Fils de Godzilla provient sans l’ombre d’un doute dans l’introduction de ce Kaijus, qui ne sert strictement à rien ! Il s’agit juste d’un « petit Godzilla » qui ne fait que nous pomper l’air ! Notamment à cause de ses « gamineries » qui, d’une part, dénature totalement le personnage de Godzilla (monstre géant destructeur qui joue presque ici les mères poules, malgré son côté un chouïa sévère). Qui donne au film un côté enfantin assez agaçant. Qui énerve par ses gémissements répétitifs de bébé. Qui arbore une laideur visuelle sans nom (sa peau grisâtre qui fait penser à celle d’un ver grassouillet, son visage inexpressif malgré ses grands yeux ouverts, son air d’ahuri éternel…). Tout dans ce monstre est à refaire !
Et il gâche le film à lui tout seul, c’est pour dire ! Comme il est stipulé dans le paragraphe précédent, ce personnage donne au long-métrage de la légèreté, même un peu trop. À tel point que nous avons l’impression de voir un film de monstres pour enfants (semblant viser les moins de 10 ans). Notamment avec ces séquences où Minilla s’amuse à vouloir écraser la queue de Godzilla pendant que celui-ci pique un roupillon. S’entraîne à cracher un rayon nucléaire comme son protecteur au lieu d’envoyer à la figure des ennemis un anneau fumeux n’ayant aucun effet. Ou qui désire faire mumuse avec la seule femme de l’histoire. Rappelons qu’à la base, Godzilla était une animalisation. Une sorte de symbole de terreur pour les Japonais, qui y voyait une de réincarnation de la peur du nucléaire. Un sujet hautement sérieux et adulte, bien loin de la gaminerie qu’est ce Fils de Godzilla.
Et puis, évitons de parler de l’histoire du film, où des scientifiques qui sont à l’origine d’anomalies biologiques (le gigantisme des insectes de l’île sur laquelle se passe la trame) tentent de s’enfuir, en compagnie d’un journaliste et d’une femme apparue de nulle part. Cependant, avec Le Fils de Godzilla, la saga commence à prendre une toute nouvelle direction dans le message qu’elle veut (ou aimerait, plutôt) faire passer. Jun Fukuda a compris que la critique envers le nucléaire était devenue obsolète, disparaissant au fur et à mesure que les films sortaient en salles. Ainsi, Godzilla se rapproche un peu plus de l’écologie, même si dans ce long-métrage, ce n’est pas encore flagrant. Juste par le biais de ces insectes géants, fruits involontaires des expériences scientifiques menées par les personnages principaux.
Si le réalisateur avait su redorer le blason de la saga avec The Sea Monster, il lui fait reperdre de la valeur en livrant un Kaiju eiga certes regardable et qui peut (légèrement) amuser, mais qui ne correspond pas à l’esprit du genre. Trop enfantin, tout simplement ! Ce qui casse en un rien de temps le mythe qu’est Godzilla, réduit ici en baby-sitter de pacotille. Pour protéger une créature qui, en plus, n’a pas lieu d’être ! De tout le bestiaire imaginé par la société Toho, Minilla reste le monstre le plus loupé qui soit, au point que sa présence à l’écran parasite l’ensemble du film.