J’attendais beaucoup de ce petit film signé par John Michael McDonagh, frère de Martin McDonagh (réalisateur de l’excellent "Bons baisers de Bruges") tant la bande-annonce promettait un ton très proche du film du frangin, à qui il emprunte l’acteur Brendan Gleeson. Et j’attendais sans doute trop car, au final, "L’Irlandais" m’a plutôt déçu. Le principal problème réside d’ailleurs dans la difficulté du film a trouver son ton, les scénaristes ayant visiblement eu le cul coincé entre deux chaises sans réussir à reproduire la formidable alchimie de "Bons baisers de Bruges". Car, malgré les apparences, "L’Irlandais" n’est pas une comédie satirique sur l’Irlande qui viendrait jouer avec les travers caricaturaux de ses habitants. Certes, le héros (Brendan Gleeson, évident) est un gros rouquin refusant le progrès mais s’adonnant aux joies de la bière et des relations tarifées… mais le personnage se voit, également, affublé d’un caractère jusqu’auboutisme, d’un glorieux passé sportif pas vraiment en phase avec la caricature attendue et, surtout, d’une grande lucidité sur ce qu’il est et l’image qu’il renvoie. On ne se trouve pas face à un benêt qui va montrer qu’il vaut plus que ce qu’on pense de lui mais bien à un flic qui refuse la compromission et emmerde toute forme d’autorité. Le réalisateur ne fait, d’ailleurs, pas de mystère de son refus de faire dans le comique communautariste puisqu’il a développé une intrigue policière sans rapport avec l’Irlande. Mais, là où le bât blesse, c’est dans le traitement de cette enquête qui n’est, au final, pas si drôle que ça puisqu’elle laisse quelques morts dramatiques sur son passage (voir le collègue et sa veuve éplorée). Le film n’est donc pas davantage une comédie policière, façon "Flic de Beverly Hills". Et ce n’est pas non plus un film policier pur jus puisque le décalage des personnages et des dialogues empêche de prendre l’histoire totalement au sérieux. Bref, "L’Irlandais" ne ressemble pas à grand-chose de connu… ce qui aurait pu être un atout majeur si le réalisateur avait été au bout de sa logique et, surtout, avait fait montre d’un peu plus de talent. Car, le film souffre terriblement de son manque de rythme et se laisse beaucoup trop aller avec ses dialogues à rallonge qui deviennent rapidement gonflant (n’est pas Tarantino qui veut)… Certes, on a droit, par moment, à une réplique bien senti ou à une scène réjouissante mais elles sont bien trop éparpillées (et noyées dans la lenteur contemplative ambiante) pour faire oublier l’ensemble. On appréciera, malgré tout, les seconds rôles qui s’en donnent à cœur joie, de Don Cheaddle en agent de la CIA perturbé que les usages locaux à Liam Cunningham en méchant flamboyant en passant par l’inévitable Mark Strong et une galerie d’acteurs moins connus mais assez hallucinants. Reste un film décevant, ni vraiment drôle, ni vraiment prenant, qui se termine, en plus, par un semblant de twist improbable et sans intérêt…