Peter Greenaway, l'un de mes réalisateurs préférés, et sans doute l'un des meilleurs réalisateurs vivant, et qui vient de recevoir un BAFTA pour sa contribution au cinéma britannique signe sans doute l'un de ses plus mauvais films, qui m'a beaucoup déçu. ça fait plusieurs années déjà qu'il ne se lasse pas de se répéter en proclamant la mort du cinéma et comment celui-ci doit sans cesse se réinventer, c'est-à-dire réinventer sa forme. Greenaway devient-il sénile ? Se plait-il dans un rôle de réalisateur maudit, mal aimé ? Veut-il se faire détester ? C'est l'impression qu'il donne avec ce dernier film.
Pour quelqu'un qui veut réinventer le cinéma, c'est assez curieux de le faire en passant par le théâtre. Car qu'est-ce que ce ce Goltzius, sinon une pièce de théâtre filmée ?
Certes, nous avons là un film, qui parle d'un homme qui organise un spectacle théâtral illustrant des passages de la Bible, nous avons donc des comédiens qui jouent des comédiens et des comédiens qui jouent des non comédiens qui vont finir par devenir comédiens, et à la fin, la comédie va se confondre progressivement avec le réel. Ce qui se passe sur scène va devenir plus vrai que ce qui devait être joué.
Il y a donc une mise en abyme qui va se terminer en confusion, ou, au contraire en éclaircissement, participant d'une sorte d'éternel retour, d'une répétition à l'infini des tabous de l'humanité, niant toute idée de progrès moral. La voix de Greenaway est très présente dans le film, puisque c'est clairement celle du narrateur. Il annonce le triomphe d'un athéisme, un renversement des valeurs futur, à la fin du film.
Pièce de théâtre filmée dans une ancienne gare. Le film ne s'en cache pas. Après, il y a des artifices, car comment parler autrement des effets de Greenaway ? Des artifices, mais des artifices ratés. Les procédés innovants ne semblent pas ici servir à la cohérence de l'œuvre, mais plutôt être d'une utilisation gratuite, comme par exemple l'utilisation d'image en miroir filmant en plan large l'ancienne gare.
On retrouvera, comme dans les autres films de Greenaway cette surcharge de références artistiques, littéraires, historiques, bref cette surcharge d'informations, qui créée cette saturation à la fois visuelle et "cérébrale", mais le texte est beaucoup moins bien écrit, et beaucoup moins subtil que pour ses autres films.
Pourtant, le sujet, l'idée de départ, qui était bonne, aurait pu donner lieu à un très bon film, mais celui-ci semble avoir été fait trop vite, sans trop de réflexion. C'est une œuvre ratée, peut-être même avortée.
Il rappelle par moment l'excellent The Baby of Macon, par la mise en scène, et par certains de ses thèmes, mais il est loin de sa réussite esthétique.
Le résultat est un ennui. Il ne se passe rien quand on regarde ce film.
Greenaway est-il donc devenu sénile ? Est-il trop vieux pour réinventer le cinéma ?
En espérant que son projet sur Eisenstein à Mexico donne quelque chose !