Un nouveau film sur la difficile condition des femmes musulmanes, allez-vous me dire ? Après " Caramel", " Délice Paloma" ou "La Source des femmes", voire " Rengaine", que peut apporter de plus cet "Héritage", au titre assez limpide ? La réponse se trouve sans doute essentiellement dans la localisation particulière de l'intrigue : un village arabe israélien en Galilée, c'est à dire cette partie de la Palestine devenue israélienne dès 1948, et dont d'ailleurs on désigne en arabe les habitants sous le vocable d'"Arabes de 48". Cette particularité se manifeste de plusieurs façons dans le film de Hiam Abbass : d'abord par la situation de guerre subie, manifeste dès l'ouverture du film par le survol des collines de Galilée alors que rugissent les réacteurs des F16 de Tsahal. Les Arabes irsraéliens ne sont pas tenus à faire leur service militaire ; ils peuvent s'engager, mais seuls 4 % d'entre eux le font. Littéralement, le conflit leur passe au-dessus : ni enrôlés côté Israël parce qu'Arabes, ni impliqué côté arabe parce qu'Israéliens.
Hiam Abbass a expliqué qu'elle n'avait pas souhaité situer précisément la date de l'action, la situation de cette guerre subie l'intéressant plus que les raisons mêmes du conflit. La guerre est omniprésente, par les bruits surtout, ceux des chasseurs, des hélicoptères, des explosions ; les dégâts se voient au loin, comme cet incendie sur la grande ville côtière, certainement Haïfa. Et quand une explosion se produit sur le village lui-même, elle est juste suggérée par l'image figée d'une photographie de mariage, ou par la panique qui saisit les habitants qui cherchent à fuir. L'autre particularité de cette localisation est l'effet de la mosaïque des peuples dans cet espace si restreint : arabes musulmans, chrétiens, juifs, druzes. Ainsi un des frères, avocat et candidat à la mairie, passe-t-il de l'arabe à l'hébreu, a pour maîtresse une juive, et compte sur ses appuis israéliens pour en faire bénéficier le village, au risque d'être traité de collabo. Un autre frère a épousé une chrétienne, et sa stérilité est considérée des deux côtés comme un châtiment de ce mariage mixte ; et pourtant, sa femme "au moins, elle est arabe".
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