Le voici enfin ! Après une longue attente, "Wonder Woman" nouvelle mouture est arrivé sur les écrans, et j'ose dire libéré (délivré ?).
Ce film porte sur lui un fardeau absolument gigantesque. Durant toute la production, il a beaucoup été question de l'aspect féminin du film, réalisé par une femme, avec une femme forte en super-héroïne ; ce qui a fatalement dérivé du côté "féminisme" et relancer l'aspect fortement misogyne de l'industrie hollywoodienne. Cet aspect est véridique et est un vrai problème, mais j'y reviendrais plus tard.
L'autre grosse charge que ce film porte sur ses épaules est d'empêcher Warner et le navire DCEU (ou DCCU, comme vous voulez...et d'ailleurs on s'en fout) de sombrer lamentablement après les déconfitures artistiques et critiques de "Batman VS Superman" et surtout "Suicide Squad" (même si ces deux films ont malheureusement eu beaucoup de succès au box-office, et je ne m'imaginais pas dire un jour une phrase comme celle-là...).
En quelque sorte, pour "Wonder Woman", comme pour Patty Jenkins et Warner, ça passait ou ça cassait.
Fort heureusement, le pari est dans les grandes lignes réussi et le film renoue avec les saveurs d'un film qui se tient, qui se veut un bon divertissement en ayant un propos intelligent (même si il n'est pas original, mais renouveler avec lui est loin d'être une perte de temps). Malheureusement, il y a malgré tout de la casse au passage et tout est loin d'être parfait. Essayons de voir ça.
Pour ce faire, il y aura des spoilers, et même des gros. Je conçois que vous pouvez réprouver connaître des choses censés vous tenir en haleine et dans le secret, mais l'homme de cinéma que je suis assume le fait d'y avoir recours afin de donner un avis le plus clair possible.
Merci de votre compréhension, recevez l'expression de mes sentiments distingués, blablabla...
Je ne ferais pas l'offense de présenter Wonder Woman ! C'est comme si j'avais besoin de présenter Dracula. Une perte de temps. Cependant, si l’icône est connue de tous, je fais un passage obligé sur l'histoire du film. Celui-ci commence avec Diane enfant et avec une problématique très classique : la jeune enfant qui veut devenir autre chose que ce à quoi elle est destinée. Le peuple amazone est un peuple de redoutables guerrières qui ont été créées par Zeus pour aider les humains dans leur guerre contre Ares, fils de Zeus et dieux de la guerre, qui a jadis répandu le mal afin que les humains s'entretuent et se détruisent. Ares a été défait par son père mais les amazones prophétisent son retour, un jour ou l'autre. C'est dans cette optique que la princesse Diane veut devenir une guerrière et non une reine. Sa mère, d'abord réticente, finie par approuvé son entrainement par sa meilleure combattante et général. Diane fini donc par devenir une redoutable guerrière, digne des meilleures amazones, et prête à défendre le monde contre Arès avec fougue, force et honneur.
Puis un jour, un pilote vient s'écraser dans cette société invisible aux yeux de tous, et apporter avec lui la guerre. L'idée qu'Ares est de retour est claire dans l'esprit de Diane, qui décide d'aller rejoindre le monde des hommes, contre l'avis de ses consœurs et de sa mère, pour tuer le dieu et faire revenir la paix ; guidée par Steve Trevor, le pilote espion.
Rien de bien nouveaux sous le soleil, mais l'histoire a le mérite d'être simple et efficace au premier abord. L'histoire de wonder woman est surtout celle d'une ouverture à un monde anti-manichéiste. Diane est d'abord une jeune femme qui ne connait le monde que par les histoires et les contes et, de facto, cela fait d'elle une héroïne de conte quelque part. À partir de là, elle va découvrir les bons et mauvais côté d'un monde en proie à la crise ; mais toujours illusionner par les récits de son enfance et croyant à une force du mal suprême qu'il suffit de tuer pour détruire tous le mauvais côté du monde.
Gros problème de mise en scène : la longue exposition nous raconte de manière très classique l'histoire des amazones et donc de Diane. Ce passage est mis en scène sans aucune surprises et est un peu long, donc un peu ennuyeux sur la fin ; mais le passage du seuil de Diana, à savoir sa prise de décision d'aller lutter contre le mal et son arrivée dans notre monde est trop précipité par rapport à l'exposition. Et surtout, elle ne prend même pas la peine d'introduire l'autre réalité du monde humain de l'époque : la guerre.
Vous me direz : "Est-il vraiment nécessaire de présenter la guerre, et particulièrement la 1ere guerre mondiale ?" Intellectuellement non, tout le monde sait ce qu'est la guerre et ce que cela implique. Mais viscéralement, il y a un grand manque. Cet aspect n'est pas absent du film, loin de là, mais il arrive beaucoup trop tard. Ce qui laisse le spectateur avec des enjeux trop abstraits au début du film, surtout que la petite première moitié du film contient beaucoup d'humour, ce qui n'aide pas les spectateurs à prendre pleinement conscience des enjeux. Il y a bien la bataille sur l'île entre les guerrières Amazones et les allemands venu à la poursuite du pilote, mais l'écrasante supériorité des combattantes, souligné par la mise en scène toute en style et en ralentis, ne pose pas de mise suffisante. L'accent, une fois Diane arrivée à Londres, étant mis principalement sur sa naïveté infantile face au monde des hommes.
Puis arrive enfin la guerre,
avec cette séquence d'anthologie du "No man's land" (qui, si j'en croie les rumeurs mais que je prends avec d'énorme pincettes, a failli être retiré du montage ce qui se serait avéré la plus grosse erreur que Warner aurait pu faire).
Là, Diane prend conscience de cette guerre tandis que le spectateur prend enfin pleinement conscience des enjeux en regardant Diane se poser comme "Wonder Woman" (même si elle n'est jamais appeler ainsi). Le film commence à prendre vraiment son sens, et ce n'est rien vis à vis de l'épreuve suprême qui approche.
Diane commence à comprendre le visage à double tranchant de l'humanité
et perd confiance dans Trevor quand celui-ci l'empêche de tuer celui qu'elle croit être l'incarnation d'Ares. Elle se lance à la poursuite de sa cible, suivie par Trevor et son équipe pour lui prêter main forte.
Elle finit par tuer l'homme en question ; mais se retourne et constate que rien n'a changé.
Elle perd alors foi dans l'humanité, disant que les hommes ne la mérite pas.
OUI !
J'achète ça ! Là, on est au cœur du propos et de la dramaturgie du film. Même si la prise de conscience de Diane est mise en scène de façon maladroite, et que les interprètes semble avoir du mal à nous le faire croire, Narrativement, ça fonctionne à pleine balle !...
...et puis PATATRA....
Ba Da Boum, comme le disait Leeloo dans "Le cinquième élément".
Alors que Diane semble avoir compris que l'humanité et non Ares est responsable de la guerre ;
voici que celui-ci pointe le bout de son nez de dieu de la guerre caché derrière un personnage à priori plutôt pour la paix
. Et là, tout ce qui a été construit avant sur le non-manichéisme de l'humanité et sur sa part d'ombre s'effondre.
Et Ares a beau répéter encore et encore après ça que l'humanité seul est responsable et qu'il n'a juste donné qu'un coup de pouce, il devient malgré tout le personnage moteur de de ce malheur et donc "innocente" les humains
. In fine, Deux chose s'en suive : d'une part tout le propos du film s'écroule, et ensuite le spectateur assiste à un combat contre un antagoniste qui n'a pas été suffisamment installé et qui ne représente donc qu'une menace limitée. La bataille finale ne devient alors qu'un simple bis-repetita de la bataille finale de "Man of steel", où la surenchère et les effets spéciaux en masse sont de mise, mais où le ressenti du spectateur est loin, tellement ce passage fait sortir du film.
D'ailleurs, est-ce je me risque à dire que ce film est un clone du film de Snyder ? Non, pas complètement ; mais les ressemblances sont nombreuses. La structure d'abord, qui est quasiment la même dans les deux films, exception faite des nombreux flashbacks chez l'homme d'acier. Les personnages se ressemblent aussi beaucoup dans leur quête absolue de la paix de l'humanité. Mais tout comme "Man of steel", le film semble entièrement basé sur sa scène de fin qui ne se veut qu'une surenchère de tout et n'importe quoi qui en fait un beau fouillis plus spectaculaire qu'émotionnellement fort.
Le générique est arrivé. Quoi ?! Zack Snyder à l'histoire ?! Et à la production ?!! Est-ce que ce clipeur destructeur de cerveau veut tellement mettre la main sur l'univers DC au cinéma qu'il s'est senti obligé de venir fourrer sa patte (vous le prenez dans le sens que vous voulez) et ses gros sabots dans l'histoire de "Wonder Woman" ? Mais avec du recul, je me demande comment je n'ai pas compris son implication plus tôt. La surenchère de style, des ralentis utilisés à tort et à travers, l'affrontement final ; tout ça ressemble à s'y méprendre à du Zack Snyder.
Tellement que, bien que ce soit une femme qui soit aux commandes de ce film, ça ne se voit pas. Je ne connais pas le travail précédent de Patty Jenkins, mais devant ce film, j'ai eu la mauvaise impression qu'elle, ou n'importe quel autre faiseur, aurait aboutie au même film. Jenkins donne dans la badasserie et dans la surenchère, tout comme ses homologues masculin. C'est là que j'en reviens à la problématique féministe dont je parlais en introduction. Que ce film ai été fait par une femme est un miracle dans le système hollywoodien, et donc un véritable scandale. Que les femmes aient si peu de place dans l'industrie est un non-sens absolu. Ce film est certes un pas en avant, mais encore faut-il que ce soit bien fait ! Mon avis est que, si Jenkins avait été totalement libre et avec du temps devant elle, ce film aurait été très différent.
Pour moi, il n'y a pas la sensibilité féminine dont ce film avait besoin. Pour preuve, l'inévitable histoire d'amour entre l'héroïne et Trevor (Chris Pine) est assez maladroitement développée, mais surtout horriblement mal terminé.
Le personnage de Trevor se sacrifie à la fin, avouant son amour à une Diane occupé et à moitié sourde.
Cela aurait pu être un excellent moment, plein d'émotion et de sens ; mais il est malheureusement bazardé au beau milieu du combat
contre Ares
et ne vient qu'ajouter au fouillis de la séquence. Cette intrigue secondaire a sa place dans le film, mais une fois que la menace principale
d'Ares
a été éliminée, et que malgré tout, il reste une menace imminente pour l'humanité et qu'il ne reste plus qu'une solution. Alors, ce sacrifice prend tout son sens. Je reconnais que narrativement, ça n'aurais pas trop collé... Mettre cette résolution AVANT le combat principal aurait marché aussi ! Et beaucoup mieux que coincer entre la poire et le fromage pour reprendre l'expression.
Au final, j'ai beaucoup parlé des défauts du film. Mais je le redis, ce film est très bon. Le film est maîtrisé et solide, au moins jusqu'au combat final, et a su capter l'essence de cette icône qu'est Wonder Woman. L'interprétation de Gal Gadot y est aussi pour beaucoup, jouant d'une naïveté touchante mais juste dans la première moitié du film (ce qui m'a rappelé avec une certaine nostalgie le personnage de SonGoku au début de "Dragon Ball"), et faisant preuve d'une force autant physique que caractérielle quand il le faut, la comédienne surpasse le reste du casting, même si l'ensemble est de qualité.
Ce "Wonder Woman" 2017 est sans aucun doute ce que le DCEU de Warner a produit de mieux depuis des années, ce qui rend ses défauts encore plus rageant.
Vraiment dommage, mais je vous le conseille fortement malgré tout.