Critique de Juin 2017.
Après des années de development hell, Warner et DC ont enfin réussi à porter Wonder Woman à l’écran, et dans son propre film cette fois. Il est quand même étonnant qu’on ait pu voir Suicide Squad au cinéma avant la plus célèbre héroïne de comics. Après les nanards Supergirl, Catwoman ou Elektra, on a enfin une super-héroïne en tête d’affiche d’un film réussi et Warner a enfin un succès à la fois commercial mais surtout critique pour son DC Extended Universe, après les accueils difficiles qu’ont subits les trois films précédents.
La réussite de Wonder Woman repose sur la décision de revenir à l’origine des films de super-héros. En effet, on est face à un film « classique » qui renvoie au Superman de Richard Donner ou au Spider-Man de Sam Raimi. On met de côté les héros torturés et la déconstruction des mythes pour revenir à la base : une héroïne qui ne se pose pas de questions existentielles, qui veut aider et sauver les gens sans se prendre la tête, juste parce qu’il faut le faire. De l’espoir et de l’optimisme, voilà ce que nous apporte Diana de Themyscira, et ce, dès qu’on nous la présente, petite princesse rebelle qui adore les histoires de batailles et qui rêve de devenir une grande guerrière amazone comme sa mère, la reine Hippolyta (Connie Nielsen) et sa tante Antiope (Robin Wright).
On retrouve des thèmes similaires à Man of Steel : tout comme Clark, Diana a deux mentors. Hippolyta (comme Jonathan Kent) a peur que Diana utilise ses pouvoirs et tente de l’empêcher de se révéler au Monde, alors qu’Antiope (comme Jor-El) encourage Diana à s’entrainer et à embrasser son destin. On apprend évidemment depuis le début que Diana n’est pas une amazone comme les autres et on comprendra pourquoi en même temps qu’elle pendant le dernier acte. Encore une fois, là où le film diffère de Man of Steel, c’est que Diana ne cherche absolument pas sa place, elle sait ce qu’elle veut et prend ses propres décisions, non sans être quelque peu têtue et naïve, offrant ainsi au film de bonnes touches d’humour mais aussi d’émotion alors que Diana découvre peu à peu le monde et les drames qui s’y produisent (en 1918, c’est la bonne époque!).
Sa petite vie parfaite est bouleversée par l’arrivée de Steve Trevor (Chris Pine), un espion américain poursuivi par les soldats allemands et qui s’écrase à Themyscira, apportant dans son sillage un bataillon d’ennemis qui ne tardent pas à débarquer sur la plage et à se faire botter le cul bien comme il faut par des amazones en pleine forme. Malgré la supériorité des guerrières, il y a des victimes. Lorsque Steve décrit la guerre, Diana décide de partir avec lui pour y mettre un terme, persuadée que la Première Guerre Mondiale est l’œuvre du dieu Arès et que si elle le détruit, alors la guerre prendra fin, comme le veut la légende qui la fascine depuis l’enfance.
Ainsi débute le périple de Diana, tout comme sa relation avec Steve qui est l’un des éléments les plus réussis du film. En effet, la complicité entre Gal Gadot et Chris Pine est formidable et les dialogues entre les deux très bien écrits. Face à la naïveté rafraichissante de Diana, Steve est à la fois fasciné et déboussolé alors qu’il tente de lui faire comprendre comment fonctionne le monde des Hommes. De la guerrière intrépide à l’innocente princesse qui découvre les horreurs de la vie, en passant par l’amusante « touriste », Gal Gadot prouve avec beaucoup de classe et de charme qu’elle a plus d’une corde à son arc, autant à l’aise dans la comédie, le drame ou l’action. La relation amoureuse entre Diana et Steve ne semble jamais forcée et est traitée avec beaucoup de délicatesse pour ne pas faire basculer le film dans le mélo gratuit. Tout comme Superman ou Spider-Man, on est dans les bons sentiments sans basculer dans le côté gnangnan, l’humour venant bien entendu désamorcer la tension. D’ailleurs, comme un clin d’œil, c’est cette fois la femme qui sauve l’homme alors qu’ils sont attaqués dans une ruelle. On appréciera également les petites critiques du sexisme de l’époque (et d’aujourd’hui finalement), tout comme on saluera le féminisme assumé et sans excès.
Parmi les retours aux sources, on retrouvera non sans humour des méchants caricaturaux comme le général Ludendorff et son assistante défigurée, le Dr Maru : des êtres bien sadiques parlant anglais avec un fort accent germanique. Pas exceptionnels mais amusants. Tout comme les seconds rôles qui sont les bienvenus sans aller jusqu’à l’abus. On passe vraiment un bon moment en compagnie de ces personnages qui participent à combler un peu les petites baisses de rythme en milieu de métrage.
La réalisatrice Patty Jenkins nous offre un formidable spectacle émotionnel mais aussi visuel, que ce soit lors des premières scènes paradisiaques à Themyscira (dont on saluera les costumes, les décors naturels et les chorégraphies de combat des amazones) ou pour la reconstitution des scènes du Londres et de la guerre des tranchées de 1918. Les scènes d’action sont très influencées par Zack Snyder (évidemment) avec ses petits effets ponctuels de slow-motion: sont efficaces et spectaculaires. Et que dire du formidable tableau de Diana sortant de la tranchée et s’avançant dans le No Man’s Land désolé et grisâtre, dévoilant pour la première fois son armure rouge et bleue, apportant de la couleur et de l’espoir. Magnifique. On soulignera également la très bonne partition de Rupert Gregson-Williams qui n'a pas manqué de reprendre et d'adapter le déjà célèbre thème d'Hans Zimmer. Seul le combat final contre Arès manque un peu de finesse sans pour autant être dénué d’intérêt.
D’ailleurs c’est sur la fin que Wonder Woman s’essouffle un peu, peut-être parce que le film avait commencé très fort. Alors que l’on atteint le moment fatidique où Diana réalise que ce n’est peut-être pas la faute d’Arès si les Hommes font des choses horribles, qu’ils ne sont pas tous bons, sa détresse émotionnelle est interrompu par Arès. On peut se demander si la perte d’innocence de Diana n’aurait pas eu plus d’impact si Arès n’y avait été pour rien, s’il avait bel et bien disparu et que les Hommes seuls étaient responsables de la guerre. Mais non, il fallait mettre en face de Diana un adversaire à sa taille, celui pour qui elle a reçu ses pouvoirs de son père Zeus. Tout comme Zod dans Man of Steel, Arès souhaite que Diana l’aide à détruire les Hommes pour restaurer le paradis sur Terre. En parallèle de cela, Steve Trevor (qui est à peu de choses près l’équivalent de Captain America sans la superforce) prouve à Diana que tous les Hommes ne sont pas corrompus et lui donne la force de se battre contre Arès dans un final dont on retiendra plus l’émotion que les explosions.
S’agissant d’un long flashback, le film débute et se conclut de nos jours, alors que Diana a décidé de reprendre sa mission de protéger les Hommes, après s’être détournée d’eux pendant trop longtemps. Il y a du bon et des gens biens dans ce monde, comme l’ont finalement réalisé Batman et Diana dans ces derniers films dont les thématiques finissent par se rejoindre.
Wonder Woman est une réussite en tant que film d’origine d’une (super)héroïne en solo et en tant que partie d’un univers plus vaste dont on a hâte d’en voir davantage.