Le jour des élections approche, le Président des Etats-Unis est empêtré dans une histoire de moeurs et sa côte électorale est au plus bas. Conrad Brean (R. De Niro), proche conseiller marketing politique du Président a donc carte blanche pour étouffer l'affaire et faire remonter la popularité de l'homme d'Etat. Pour ce faire, Brean s'attache les services de Stanley Motss (D. Hoffman), producteur hollywoodien à l'imagination sans limites. Dès leur première rencontre, les deux hommes s'accordent sur la nécessité d'un gros coup de "communication politique" et ne font rien de moins qu'inventer de toute pièce une guerre qui monopolisera l'attention des médias durant la campagne présidentielle, jusqu'au jour de la réélection.
Tiré d'un roman de Beinhart, le film est un bluff "hénaurme" qui tient le spectateur en haleine durant plus d'une heure et demie. Sur la base d'un scénario d'orfèvre ciselé par l'excellent David Mamet (par ailleurs maître du connivence movie), "Des hommes d'Influence" se résume peu ou prou à cette réplique d'un machiavélisme achevé proférée par Conrad Brean : "mais bien sûr que nous sommes en guerre, la preuve c'est qu'on voit cette guerre à la télévision, vous ne regardez jamais la télévision ?". Satire impitoyable de la politique du spectacle et de la manipulation médiatique, "Des hommes d'influence" provoque autant le fou rire qu'il procure de frissons dans le dos, car hormis la dimension démesurée du propos, le film ne relate rien que de fort couramment pratiqué par les tenants du pouvoir politique afin occulter certaines réalités par le mensonge d'Etat.
Film excessif mais potentiellement vraisemblable, la réalisation de Barry Levinson souffre cependant d'une mise en scène à la facture hollywoodienne trop classique. Des réalisateurs tels que Milos Forman ou Mike Nichols, pour n'en citer que deux, auraient probablement assaisonné l'objet cinématographique de façon bien plus pimentée. Cela dit, comme déjà mentionné, l'excellence du film vient avant tout du scénario. Et ce scénario est l'occasion pour deux monstres sacrés du cinéma américain de s'en donner à coeur joie. De Niro prend visiblement grand plaisir à jouer le personnage de ce conseiller en image politique, totalement cynique et d'une mauvaise foi sans limites, qui accomplit son "métier" en arborant un éternel sourire en coin de la pire espèce. Mais c'est surtout le personnage du producteur de cinéma interprété par Dustin Hoffman qui crève l'écran, de par son côté halluciné fait d'un mélange de mégalomanie paranoïaque et d'égoïsme enfantin. Personnage qui disparaitra à la fin du film pour ne pas avoir compris que l'arnaque médiatique qu'il avait montée n'était pas un simple jeu, mais relevait du secret d'Etat. Tenant autant du comique burlesque que de la fable effroyable, "Des hommes d'influence" aurait mérité quatre étoiles si la mise en scène avait su se "lâcher" un peu plus, à l'image de son scénario échevelé.