En revoyant Habemus papam, j'ai trouvé l'ensemble un peu long et moins percutant que la première fois. Effet de la version française, plus de distance personnelle avec l'Italie? La performance de Piccoli reste étonnante et expressive dans la retenue. Cinéma 2 - mai 2018.
Illustration frappante de l’idée « Dieu n’existe pas, je l’ai rencontré ». Immersion totale dans un environnement qui nous est proche quand on connait bien l’Italie : visite récente à Rome, présence à Naples lors de l’élection du dernier pape Benoit XVI. Moretti égratigne la pyramide du pouvoir catholique, composée d’hommes âgés pour ne pas dire plus, coupés du monde réel, empêtrés dans un cérémonial et un fatras de strates fossilisées depuis des siècles. Parallèlement, les croyants attendent sincèrement le guide suprême et les scènes filmées de la population sur la place saint-Pierre laissent transpirer la foi à grosses gouttes.
La psychanalyse ne sort pas indemne non plus, Moretti le meilleur de sa génération ne comprend pas pourquoi sa femme l’a quitté pour un autre psychanalyste !! La première confrontation avec le candidat désigné pape en présence des cardinaux est un petit bijou. Moretti se disperse ensuite un peu dans une partie comédie, le tournoi de volley-ball entre cardinaux est longuet. Il illustre cependant avec un humour qui rappelle Woody Allen le besoin de liberté, de sortir des carcans dans lequel des humains – tout cardinaux qu’ils soient- sont enfermés. Ils ont des émotions, aiment gagner, jouer, se dépasser, être ensemble … voire parier et peut-être tricher… Cette partie du scénario s’égare un peu : Piccoli est parti, pourquoi on garde Moretti sans continuer le traitement, mais c’est mineur.Et puis, il y a Piccoli, qui traverse , que dis-je qui survole le film. Le regard perdu, comme une personne agée en fin de vie, il est dépassé par la charge et comble d’effronterie, et il le dit. L’Eglise n’apprend-t-elle pas à être sincère ? la déclaration finale, appuyée par la présence des cardinaux aux différents balcons est saisissante de désarroi collectif face à une situation qui déstabilise une organisation gigantesque et qui vient de voter par calcul de pouvoir, sa propre pusillanimité.Revenons à Piccoli, l’idée de lui faire révéler son désir jamais accompli d’être acteur est une trouvaille de génie : n’aura-t-il pas fait l’acteur toute sa vie ? Son escapade dans la vraie vie- prendre un café, comment téléphoner, prendre le bus- est une bouffée d’air frais qui balaye un parcours bien balisé.
Son sourire esquissé au moment de l’élection est éloquent. Pendant que le bureau scrutateur scande Melville, Melville !! Le Pape se regarde jouer l’acteur à la TV, les cardinaux débarquent au théâtre pour finir la pièce interrompue, on est sorti de l’écran, la Rose Pourpre du Caire n’est pas loin. Cinema - septembre 2011 - ****