Mais qu’a donc voulu faire Moretti avec cette fable – car c’en est une, l’argument étant absurde, mais qui est dépourvue de la morale accompagnant obligatoirement les fables –, fabriquée à grands frais, mais qui n’a rien à dire ?
Donc, au Vatican, le conclave élit un pape qui n’était pas candidat et n’a même recueilli aucune voix au premier tour du scrutin. Chose évidemment impossible, sachant que toute élection est précédée d’une campagne électorale acharnée de la part des papabile, dans laquelle abondent les tractations, compromis, coups fourrés et promesses qu’on tiendra une fois sur dix ! Au passage, une scène ridicule où l’on montre chaque cardinal priant Dieu de ne pas être choisi, ben voyons...
Puis l’élu, qui a accepté son élection, refuse de se montrer et donc de rendre la chose officielle : on ne peut même pas dire quel est son nom. Est alors convoqué un psy, qui doit sonder l’esprit de son « client »... en présence de tous les cardinaux, autre impossibilité ; consultation qui est suivie de la séquestration dudit psy, pour éviter les fuites (quelles fuites ? Il ignore l’identité de son patient d’une heure). Après cela, en emmène le pape chez une autre psychanalyste, l’épouse séparée du premier, en ville, mais il s’échappe. Peu après, il prend une chambre dans un hôtel et se mêle à une troupe d’acteurs qui répétait « La mouette »... dans le couloir de l’hôtel. Mais le chef de la troupe est emmené dans une ambulance (évocation de « Sunset boulevard », pour se concilier les cinéphiles), et le pape dissident assiste à la répétion suivante dans un théâtre (comment a-t-il été admis ?). Pendant ce temps, au Vatican, le psy s’efforce de distraire les cardinaux, qui n’ont pas le droit de quitter les lieux puisque le conclave n’est théoriquement pas terminé avant la proclamation du résultat, en organisant un tournoi de volley-ball dans la cour située sous la fenêtre des appartements du pape, où le défaillant a été remplacé par un figurant chargé de secouer les rideaux pour faire croire à sa présence ! Puis, le pape assistant à la représentation de la pièce (les répétitions sont déjà terminées, au bout de deux jours ?), tous les cardinaux envahissent le théâtre et l’applaudissent, imités alors par le public, qui pourtant ne l’a jamais vu.
L’épilogue est édifiant : on a convaincu le pape de venir se montrer au balcon de la basilique Saint-Pierre, il le fait mais annonce sa démission et disparaît.
Voilà donc le navet que les critiques ont couvert de louanges. Notons que c’est le réalisateur en personne qui joue le psy, et que la très longue séquence du tournoi de volley-ball, sans aucun utilité dans le récit, n’est là que pour satisfaire son narcissisme bien connu : Moretti, mauvais acteur, tient beaucoup à jouer dans tous ses films !