Autant le dire tout de suite : il faut être un peu motivé pour apprécier Plan B, à savoir être homo et/ou aimer Buenos Aires. Car c’est lent, très lent. Heureusement, au bout d’un moment on se met dans le rythme, on guette toutes les nuances dans les voix de ces Vitelloni porteños (car on ne saura jamais ce qu’ils font dans la vie à part traîner au lit en sleubard, boire des Quilmes sur la terrasse et se parler pendant des heures de profil) qui laissent entendre que, peu à peu, l’ « idée » fait son chemin, celle que, après tout, il pourrait y avoir entre eux un peu plus que de l’amitié. Après, toc, plan fixe sur les terrasses un peu lépreuses de la capitale, les immeubles de Libertador qui montent la garde sur fond de soleil couchant et d’avions qui décollent d’Aeroparque. Toute la bande son de Buenos Aires est là : incessant trafic aérien et automobile, « rock nacional », familles qui s’engueulent dans les immeubles. Elle ponctue le tango-hésitation de Pablo et Bruno, entre reliquats machistes et faibles assauts sur leur ex-petite amie (au singulier, car c’est la même). Des femmes qui au demeurant paraissent beaucoup plus résolues que les mecs au niveau relations et sexe, et qui semblent regarder, avec fatalisme et sans trop de regret, ces quasi-trentenaires aussi immatures et mollassons que des ados leur filer entre les doigts. Comme des étudiants attardés, ils se complaisent dans un univers un peu crapoc, où on change rarement les draps, le torchon de la cuisine, ou les vêtements que l’on porte, où on ne prend de douche que dans les vestiaires, eux-mêmes assez douteux, du club de gym. Ils s’en foutent, ils sont amoureux, ou plutôt sont en train de l’admettre, l’un plus vite que l’autre, comme dans une relation « normale ». Et nous peu à peu on fond aussi, on guette le moindre geste de rapprochement , observe les tactiques amoureuses - bon OK tout en se rinçant un peu l’œil sur les contre-plongées très « caravagesques » des deux garçons dans leur sommeil, seule chair visible dans un film finalement assez pudique. La fin, aussi joyeuse qu’une plongée de gamins dans la piscine, ne vous fera pas regretter ces presque deux heures de cinéma délicat et humain, au total moins soporifique que de soi-disant blockbusters à la Inception.