Le postulat qui sous-tend l’édifice A Star is born, cuvée 2018, est tout de même assez alarmant : on prend une chanteuse confirmée et un acteur confirmé dans la conviction qu’il suffira de croiser leurs propriétés pour aboutir à Bradley chanteur – ce qu’il est déjà, certes, la notoriété en moins – et Gaga actrice. Pas de chance pour le film, la mixture ne prend guère, et on a le droit à la sempiternelle succession de clichés donnant lieu, en retour, à un déluge de chansons interchangeables venues boucher les trous d’un scénario confondant de linéarité. On ne comprend pas comment l’acteur-réalisateur a pu ainsi troquer la véritable thématique de son œuvre, à savoir l’alcoolisme comme source vive de création artistique et de destruction existentielle, pour lui préférer un lissage mélodramatique des plus malvenus. Car certaines scènes fonctionnent : voir Cooper apparaître à l’écran seul dans son garage, entre la vie et la mort, sans prononcer un mot, ne lançant que des regards terrifiés et perdus, fait sens. Le profond désespoir du personnage, oscillant entre son ange de lumière et ses démons intérieurs, aurait mérité meilleur traitement, tant la mise en scène martèle la détresse à grands coups de premier degré parfois gênant (la remise de prix, par exemple), toujours balourd. L’écriture alterne regards lourds de signification et dialogues piteux – « j’aime trop ton nez, laisse-moi le toucher une p’tite seconde » – qui, s’ils évoquent le passé de Lady Gaga, ne se justifient jamais à l’écran. Car qui trouverait Ally laide ? Personne ! Trop long pour, finalement, ne peindre qu’approximativement la naissance d’une étoile, A Star is born prouve certes le talent de Stefani Germanotta, mais échoue à construire un destin commun dans la durée : le film s’achève sur une tournée d’adieux, comme aveu explicite de la fugacité des talents actuels. À cause de leur omniprésence, les chansons se sont elles-mêmes épuisées. A Star is born accumule sans vraiment construire. On rallume la lumière, et il n’y a plus rien.