Critique du film Barbie par Greta Gerwig
Lorsque Greta Gerwig, cinéaste reconnue pour son style distinctif et ses perspectives uniques, a annoncé son implication dans un film basé sur la célèbre poupée Barbie, l'expectative était immense. Comment une réalisatrice de son calibre allait-elle naviguer l'univers rose bonbon de Mattel tout en apportant sa touche artistique ?
Visuellement, "Barbie" est une explosion de couleurs et de créativité. Les décors somptueux, inspirés de l'architecture californienne et des films musicaux des années 40 à 60, sont un régal pour les yeux. La maison de rêve de Barbie, une réplique hyperréaliste des jouets Mattel, est à la fois kitsch et magnifiquement détaillée. Les costumes, signés Jacqueline Durran, mêlent avec brio nostalgie et modernité, réinterprétant les tenues iconiques des années 50 et 60 avec une touche contemporaine.
Le casting, mené par Margot Robbie et Ryan Gosling, est un autre point fort du film. Robbie incarne une Barbie stéréotypée avec justesse, apportant une profondeur inattendue à un personnage souvent perçu comme superficiel. Gosling, en Ken, est à la fois charmant et comique, apportant une dose d'humour nécessaire dans ce monde idéalisé. Les seconds rôles, de Kate McKinnon en Barbie Bizarre à America Ferrera en Gloria, ajoutent des couches d'émotion et de comédie.
Cependant, le scénario, co-écrit par Gerwig et Noah Baumbach, vacille entre satire et sérieux, sans jamais trouver un équilibre parfait. L'idée de base – une Barbie en quête de sens dans le monde réel – est intrigante, mais son exécution est parfois maladroite. Les thèmes de l'identité et de l'émancipation sont abordés, mais souvent de manière trop explicite, perdant ainsi la subtilité que Gerwig maîtrise habituellement.
Le voyage de Barbie et Ken dans le monde réel offre quelques moments mémorables, notamment grâce à une satire bien sentie de la culture d'entreprise de Mattel. Will Ferrell, en PDG caricatural, apporte une critique acerbe de l'industrie du jouet. Cependant, certaines scènes, notamment celles où Barbie est confrontée à des questions de harcèlement et de normes de beauté, semblent forcées et manquent de nuance.
Le troisième acte du film, où Barbie retourne à Barbieland pour renverser l'ordre patriarcal instauré par Ken, est à la fois le plus ambitieux et le plus problématique. Les idées sont là, mais leur mise en œuvre est trop précipitée. Le discours de Gloria, bien que puissant, tombe un peu à plat dans le contexte global du film, donnant l'impression d'une leçon morale plutôt que d'une véritable évolution narrative.
En termes de bande sonore, la collaboration entre Mark Ronson et divers artistes contemporains ajoute une touche de modernité et de dynamisme. Les chansons, bien intégrées dans l'intrigue, apportent une énergie supplémentaire aux séquences dansantes et aux moments clés. La version réinterprétée de "Barbie Girl" par Nicki Minaj et Ice Spice est un clin d'œil amusant au passé controversé de la chanson.
En conclusion, "Barbie" est un film qui brille par sa mise en scène et ses performances, mais qui peine à trouver un ton cohérent. Greta Gerwig réussit à apporter une certaine profondeur à un univers en plastique, mais les enjeux narratifs et les messages parfois trop didactiques alourdissent le récit. C'est une œuvre visuellement époustouflante et parfois touchante, mais qui aurait bénéficié d'une approche plus subtile et nuancée. Une expérience cinématographique mitigée qui laisse un goût d'inachevé malgré ses nombreuses qualités.