Sherlock Holmes sur grand écran, c'est l'occasion rêvée de revêtir sa rédingote poussiéreuse restée trop longtemps au fin fond de la garde-robe, d'arborer nos plus beaux costumes en tweed, de porter dans un élan de dandysme extraverti le deerstalker malheureusement passé de mode, et surtout de fumer la pipe, ustensile à tabac ou démultiplicateur de l'intelligence apparente.
Autrement dit, le personnage charismatique de Sir Arthur Conan Doyle incarne l'élégance dans l'imaginaire de la collectivité, et se confronter au récit du détective devient un jeu d'auto-incarnation, où chacun essaie d'y aller de sa petite théorie concernant les mystères sur lesquels Watson et son mentor sont amenés à enquêter. Le filon que la licence se devrait donc d'exploiter, c'est justement de tirer le spectateur hors de sa passivité usuelle, le mettre en présence des faits, des indices pour qu'il se prête au jeu de l'enquête et de la réflexion, entre deux bouffées de tabac, puis, le submerger par l'intelligence hors-norme de notre chère loque (euh... Sherlock pardon), qui avait vu claire là où nous étions cloitré dans le flou total.
Bien entendu, à l'instar du premier opus, le Sherlock de Guy Ritchie est au récit interactif, ce que Mimi Mathy est à Simone Signoret. Car les choix de l'ancien publiciste portés davantage par des motifs commerciaux qu'artistiques, confèrent à l'ensemble une dimension spectaculaire, voir hystérique, où mystère rime avec misère, au dépend d'un récit plus cérébral. Ainsi, Robert Downey Jr. , regard de fou furieux défoncé au crack et humour pince-sans-rire dont je ne me lasse pas, est ici plus proche d'Indiana Jones que de Hercule Poirot. En effet, le personnage brille avant tout par la grâce de ses poings et pirouettes, au même titre que le film qui peine à instaurer une trame digne de ce nom, ce qu'avait réussi le premier métrage. Les seuls faits de gloires illustrant l'intelligence du détective persistent à user et abuser du même concept pourtant passablement laid, basé sur un découpage rapide, une kyrielle d'insert, une voix-off et éventuellement un flash-back épileptique pour bien achever les rétines et pupilles encore agonisantes face à tant de violence graphique. Certes, quelques moments bien trouvés, une tranche de dialogues pleins d'esprits, ou une poignée de scènes viennent apporter leur moment de bonheur, mais nous rappellent surtout à quel point Ritchie à un savoir-faire technique qu'il exploite avec l'intelligence d'un boeuf, à l'image de l'hideuse course-poursuite dans la forêt, dans laquelle monsieur fait mumuse avec son directeur des effet spéciaux ainsi que le budget de la production. Au même titre, les scènes de nuit demeurent particulièrement moche, notamment par la faute d'une colorimétrie sur-appuyée. Mais là-dessus, l'affiche a au moins le mérite de ne pas mentir.
Evidemment, si l'auditoire est averti, Sherlock Holmes reste bien sympathique malgré la collection personnelle de fautes de goût de son réalisateur, et recèle quelques trouvailles que l'on avait déjà découvert dans le premier film du même nom, mais qui fonctionnent toujours malgré la redondance de leur emploi.
PS : J'ai bien rigoler à Noomi Rapace qui fait de la figuration.