Véritable mythe du cinéma fantastique Hollywoodien des années 30 : Dracula.
Tout d'abord introduit par un somptueux extrait de la musique du lac des cygnes, le film commence par une annonce de ce qui nous attend, à savoir la présence d'un comte maléfique assoiffé de sang.
Si Tod Browning avoua être déçu de son film plusieurs années après, il put toutefois se vanter d'avoir réussi à inscrire le comte vampire dans l'Histoire du cinéma.
Rempli de somptueux plans comme les levers et couchers de soleil, ou encore la vue du château au sommet de la colline, ce Dracula sait nous satisfaire visuellement, et pas que.
Hormis les décors gothiques et expressionnistes, comme le château ou la crypte de l'abbaye, l'oeuvre de Browning est d'une richesse théâtrale impressionnante. Car bien qu'il soit une oeuvre de cinéma, ce Dracula est représenté de façon théâtrale à de nombreuses reprises. Notamment dans la mise en scène des effets spéciaux, que Tod Browning veut absolument cacher, que ce soit lorsque le comte sort de sa forme de chauve souris, ou lorsqu'il s'enfuit en loup, cette scène ci n'est d'ailleurs pas visible, elle est uniquement mentionnée. Ce qui n'est peut être pas plus mal, tout dépend du réalisme et de la vision de chacun, pour ma part je respecte celle de Browning.
Mais au final, si Dracula rencontrât un tel succès, c'est aussi mais surtout grâce à un jeune talent (de 50 ans tout de même) alors interprète du même comte dans une pièce de théâtre de Broadway : Bela Lugosi. A lui seul, Lugosi réinvente le mythe, transforme le monstre en séduisant aristocrate meurtrier et sans scrupules. Son interprétation, qui fit de lui une star incontestable, fut celle de sa vie. Au point d'inscrire "Bela Dracula Lugosi" sur certains génériques auquel il figurait. Mais revenons à celle-ci. Si il campe à merveille ce rôle sombre et mystérieux, c'est grâce à un talent fou. Il parait grotesque aujourd'hui de jouer de la sorte, mais en 1931, à la naissance de l'age d'or du film d'horreur fantastique, les plans des yeux de Lugosi sont un mythe à eux seuls. Éclairés par des panneaux lumineux en tête d'épingle, ils installent à eux seuls toute la tension et la gravité du comte. De plus, ajoutés à ses yeux, les costumes sont sublimes, au seul exemple de celui de Dracula, se montrant comme un riche aristocrate, sublimé par une longue cape noire qui met tout son être en valeur.
Le reste de la troupe sait aussi se démarquer. Edward Van Sloan réussi à camper un Van Helsing convaincant, apportant sagesse et sûreté, aux côtés d'un Dwight Frye génial en Renfield, qui arrive à donner bien d'importance à son rôle.
Si Dracula reste aujourd'hui inscrit dans l'Histoire, c'est aussi grâce aux talents de mise en scène présentés, qu'il s'agisse des silences transitoires rappelant les muets ou encore les scènes ou dialogues devenus cultes, exemple de la scène du contrôle mental ou bien du non moins célèbre : "I never drink...wine".
Il ressort de ce Dracula une grande partie de satisfaction, mais aussi une toute légère déception, notamment par la fin, ou seul un gémissement en hors champ nous annonce la mort du comte Dracula.
Mais le tout est tant séduisant que l'on oublie ce petit détail, ce Dracula reste inscrit et ne s'oublie pas, se gravant ainsi dans les mémoires de chacun jusqu'à la fin, et peut être même, outre-tombe.