Avec Potiche, François Ozon vient certainement de réaliser son film le plus grotesque.
1977, suite à une grève, un patron méchant, réac et misogyne se voit remplacé par sa douce, docile et obéissante femme à la tête de son entreprise. Mais, bien entendu, il faut toujours se méfier de l’eau qui dort…
Commence alors un festival de kitscheries ultra référentielles où tout sonne faux.
Côté vêtements, on navigue entre pull jacquard, robe à fleurs, col roulé et jeans moule paquet. (Donald Cardwell, es-tu là ?)
Pour les décors, on passe des téléphones orange ou habillés de tissus aux papiers peints à gros motifs - censés représenter les années 70. (Manque bizarrement à l’appel dans les voitures : les volants en moumoute et le chien qui hoche la tête sur la plage arrière ! Mais que fait Roger Harth ???).
Les acteurs en font des tonnes. Judith Godrèche à la coupe de cheveux de Super Jaimie, Fabrice Luchini cachetonne, Jérémie Renier déambule de scènes en scènes, un sourire ultra bright aux lèvres et Karin Viard a dû voir de la lumière en passant devant le studio. Seul Depardieu reste égal à lui-même et s’en sort honorablement.
La musique hésite entre un ersatz des compositions de Vladimir Cosma, et une simple compilation des tubes de l’époque – Michèle Torr, Il était une fois… - destinée sans doute à vendre la bande originale du film.
Le scénario, adapté d’une pièce de boulevard aux situations prévisibles, fait inévitablement penser à des films d’époque - Je sais rien mais je dirai tout de Pierre Richard (1973) ou La Zizanie de Claude Zidi (1978) - sans parvenir à les égaler.
Derrière cette énorme pantalonnade, on voit bien où François Ozon voudrait en venir : parler d’hier pour mieux dénoncer les travers d’aujourd’hui.
Hélas, le résultat est surtout convenu et un brin démagogique (les hommes politiques de tous bords sont forcément pourris et la femme est l’avenir de l’homme) quant il ne sombre pas dans la facilité : Fabrice Luchini lançant un « casse-toi pauvre con !» ou préconisant de « travailler plus pour gagner plus ».
Le plus triste dans tout ça, c’est surtout de voir Catherine Deneuve tenter de se dépêtrer d’un personnage, autrefois interprété par Jacqueline Maillan, dont elle n’a, ici, ni l’aplomb, ni l’abattage.
Et que dire des lourdes références au passé prestigieux de l’actrice et, notamment, à sa collaboration avec Jacques Demy.
L’usine que dirige son personnage est une fabrique… de parapluies et Ozon ose faire chanter « en vrai » l’actrice. Ce que même le réalisateur des Demoiselles de Rochefort avait renoncé à faire lorsqu’elle était pressentie pour jouer dans Une chambre en ville.
On comprend pourquoi…
Dans un final ridicule, Deneuve massacre avec une telle allégresse la chanson de Jean Ferrat : C’est beau la vie, que le poète doit se retourner dans sa tombe.
Pas de bol, en nous prenant pour des cruches, Potiche ne devrait amuser que les « adulescents » qui fantasment les années 70 et les nostalgiques d’Au théâtre ce soir.