Dans les rues de la ville, la neige généreuse étouffait les pas, enveloppait les bâtiments et les gens d’une blancheur immaculée tandis qu’un épais silence s’abattait sur la cité vosgienne. Quel heureux hasard, s’accordèrent d’ailleurs à dire et les organisateurs et les festivaliers, faisant fi par la même occasion avec un bel enthousiasme des problèmes matériels que pouvait causer la venue subite d’un aussi épais manteau neigeux.
Les représentants du Septième Art étaient bien là, mais allait-il en être de même du Fantastique lui-même ? Sur la petite quinzaine de films vus à l’occasion de ce 17ème Festival du Film Fantastique de Gérardmer, on peut se permettre d’affirmer que oui. Les films présentés en compétition et hors compétition abordaient plusieurs facettes différentes du genre, la qualité de l’ensemble étant remarquablement homogène.
Par la suite, cette diversité s’est trouvée se reflétée dans les récompenses attribuées, puisqu’à côté d’une poignante réflexion sur le thème de la responsabilité transposée entre des univers parallèle (Die Tür –La Porte- de l’allemand Anno Saul, reparti avec le Grand Prix de Gérardmer), cohabitait le plus naturellement du monde un récit paranoïaque issu du monde de la Science-Fiction (Moon, du britannique Duncan Jones, fils du célèbre touche-à-tout David Bowie, est lui reparti avec deux prix, celui du Jury, et celui de la Critique). En outre, un excellent film canadien (5150 Rue des Ormes, qui empocha le Prix du Public), fut présenté sur la scène de la grande salle de l’Espace Lac par son metteur en scène, Eric Tessier. Ce même Eric Tessier qui avait fait le déplacement six années auparavant, lorsque son film Sur le Seuil avait été sélectionné lors de la 11ème édition du festival. La présentation du réalisateur, ludique, prit des allures de confidences autour d’une table, au cours de laquelle il gratifia son audience d’une sympathique explication de texte ayant pour but de faire comprendre au public français les nuances du langage imagé utilisé au Québec.
A côté de cela, les amateurs de sensations fortes pouvaient faire le plein d’une violence pleinement assumée, puisque le monde des morts était à l’honneur. D’abord avec La Horde, des français Yannick Dahan et Benjamin Rocher, récompensé par le Prix du Jury Syfy Universal, et ensuite avec le sympathique Doghouse du britannique Jake West bien connu du public gérômois. Le maître du genre incontesté, George A. Romero, était même un peu là, par l’intermédiaire de son dernier film (Survival of the Dead, peut-être le plus discutable de ses illustres rejetons), alors que des cinéastes serbes montraient qu’ils étaient capables de reprendre le flambeau avec quelques idées intéressantes.
La compétition officielle était équilibrée, en ce sens qu’elle était composée de films de grande qualité. Un ton en dessous, les films présentés en avant-première, hors compétition, ou en rétrospective, n’avaient pourtant pas à rougir. Le dimanche 31 janvier au soir, alors que le festival touchait à sa fin, la conclusion s’imposait d’elle-même. La cuvée 2010 de Fantastic’Arts avait largement rempli ses objectifs : faire frissonner, sursauter, hurler ou encore émouvoir les quelque 35000 visiteurs attirés dans la perle des Vosges par la promesse de moments de convivialité et d’échanges inoubliables.
La Palme de l’étrange – mais pas de la qualité- devrait probablement être attribuée à un film franco- belge du nom d’Amer que l’on pourra voir sur nos écrans à partir du 3 mars. Sélectionné dans le cadre de la compétition officiel, le film a été réalisé par deux metteurs en scène trentenaires qui souhaitaient rendre hommage à un genre aujourd’hui un peu oublié, le giallo italien. En dépit de certaines qualités esthétiques et artistiques, le film a reçu un accueil mitigé de la part des festivaliers, d’une part parce qu’il n’a qu’un rapport très lointain avec le genre fantastique (cela aurait pu lui être pardonné, comme ce fut fait pour le prenant 5150 rue des Ormes), et d’autre part parce qu’il est manifestement l’oeuvre de cinéastes plus occupés à se regarder filmer qu’à raconter une histoire.
L’autre défaut majeur du film, et qui fit beaucoup sourire à Gérardmer, est sa forme expérimentale, appliquée à tous les éléments du film. Que ce soit dans la manière de filmer, l’éclairage, le travail sur les couleurs ou encore la narration déstructurée, de nombreux aspects du film renvoient à certaines productions des années 60 et 70. Certes, cela pouvait raviver certains souvenirs agréables (en particulier l’excellente musique), mais devant l’absence d’élément conducteur, le spectateur ne s’intéresse pas suffisamment à l’histoire, pas plus qu’il ne s’identifie de près ou de loin à l’un ou l’autre personnage. Heureusement, dans la toute dernière partie, le film prend son envol, ce qui lui permet d’atténuer, sans parvenir à les faire oublier, les défauts rencontrés pendant la première heure. Sans aucun doute, Amer était l’Ovni de cette 17ème édition du Festiva