Un des fleurons de la littérature française, déjà adapté 358 fois, mis à l’écran en 3D par le réalisateur de Resident Evil ? Il y avait de quoi prendre peur, et l’inénarrable bande annonce n’avait pas fait grand-chose pour rassurer. Poussé par une envie de déconner un peu, ou alors par une forme particulièrement tordue de curiosité morbide, certains ont osé pousser la porte des salles obscures. Et contre toute attente, si le film présente la plupart des défauts attendus, il en joue avec une telle liberté et l’envie affichée de ne pas se prendre au sérieux que l’ensemble devient franchement regardable, et même parfois assez plaisant.
L’évidente bonne idée du réalisateur, docteur es bourinisme, est d’être allé jusqu’au bout de son concept décérébré, rythmé, flashy, hautement invraisemblable et avec une assise historique équivalente à celle d’un Michael Bay sous acide. Ca commence d’ailleurs plutôt bien : Athos étrenne sa tenue de commando sous marin en dessoudant 4 gardes façon Batman, Aramis saute de 30 mètres de haut dans une gondole, et Porthos dessoude des chaines encastrées dans un mur pour faire le Chevalier du Zodiaque avec les pauvres pandores vénitiens. Au milieu de tout ça, Milady débarque avec une robe de bal pour onduler sa poitrine au vent afin de motiver les troupes. On sait plus trop où on est, quelque part entre les Aventuriers de l’arche perdue, Belphegor, Matrix et Les Mystères de l’Ouest. Et encore, on a pas encore vu Louis XIII dans un costume à la Jean Paul Gauthier ni la redécoration du château royal par une équipe artistique qui ne doit pas fumer que des jonquilles.
Et c’est ce côté parfaitement décomplexé qui fait que la pilule passe vraiment bien. Le plat est aussi agrémenté par quatre mousquetaires qui ne manquent pas de prestance, grâce à la présence des très bons acteurs convoqués pour l’occasion, y compris le sémillant Logan Lerman qui fait un D’Artagnan très réussi. Vous rajoutez à tout cela des combats à l’épée bien foutus et une 3D pour une fois pas complètement inutile et vous tenez une adaptation plutôt réjouissante, et tous cas beaucoup plus fun que les deux dernières pathétiques tentatives, où la production n’avait pas jugé nécessaire de faire voler des bateaux ou de défigurer Notre Dame de Paris.
Une grosse déception quand même : dans cet univers cartoonesque et surréaliste, on attendait beaucoup des trois méchants. Si Mads Mickelsen fait le job en Rochefort, on ne peut pas en dire autant de ses deux acolytes. Dans un rôle en or de Jack Sparrow anglais, Orlando Bloom montre une fois de plus qu’il est un acteur désespérant. Quand à Christoph Waltz, il fait le minimum syndical en Richelieu, trop pressé de toucher son chèque et de retrouver les plateaux de Tarantino et de Polanski.
Pas de nanar héroïque donc, pas de ratage franc, mais un petit film kitch et marrant, qu’on prendra plaisir à regarder à la télé un soir de grande fatigue, à condition bien sur de déposer son cerveau à côté du canapé.