Les mecs de droite, moi, je les nique. Pour convertir un mec du FN, ça peut prendre jusqu’à dix jours. Un fan de Bayrou, c’est une demi-journée maximum »
Arthur Martin a une vie ennuyeuse qu’il traverse comme un fantôme, rythmée par des autopsies d’oiseaux et des visites chez ses parents. Lors d’une intervention à la radio, il est vivement pris à partie par Bahia, gauchiste beur un peu timbrée qui va de petits boulots en petits boulots, mais qui a un hobby pour le moins orignal : coucher avec des gens de droite pour les rendre de gauche. Manque de bol, malgré les apparences, Arthur est jospiniste.
Le cinéaste Michel Leclerc a choisi pour ce Nom des Gens de mêler les genres : c’est évidemment la comédie avec de gros gags (trop) prévendus par la bande annonce, surtout véhiculés par l’ouragan Bahia (formidable Sara Forestier), mais aussi un film qui a des choses à dire sur les préjugés, la famille, la mémoire, la communication. Réalisé de manière originale avec quelques bonnes idées (les biographies, les personnages discutent avec leurs « doubles » jeunes), le mélange est à la fois curieux et inconstant, mais vraiment rafraichissant et original, surtout parce le film ose tout, sans aucune restriction ni aucune contrôle. On se ballade à poil dans la rue, on passe d’un mec à l’autre sans trop de problèmes, on déconne sur les animaux morts, on insulte les gens dans plusieurs langues, on se tape un responsable local du MEDEF jeunes, etc…
Et le « message » politique n’est pas en sous titrage, ou au second degré, il EST l’essence des personnages, de leurs actions, assené par Sara Forestier en mode bulldozer. On laisse de côté les sages comédies de mœurs parisiennes gentiment bobo pour passer deux heures avec une activiste qui considère que tous les gens de droite sont des fachos et qu’il faut les soigner, qu’ils souhaitent le fin de l’humanité et ne pensent qu’au fric toute la journée. Loin de promouvoir un message de ce type au premier degré, le réalisateur s’en sert surtout comme une source de gags inépuisable, même s’il finira quand même par intégrer un vrai et beau point de vue avec une chouette pirouette finale. Le film se nourrit aussi de la jolie ribambelle de secondes rôles, que sont les quatre parents, tour à tour touchants, drôles, effacés et bien sûr insupportables chacun dans leur genre.
Le film a donc beaucoup de fond, quelques très bons gags et une galerie de personnages à la fois originale. Pour réussir une excellente comédie, il manque au réalisateur du rythme et une constance dans les scènes et les dialogues : le film traverse parfois de gros trous d’air et manque parfois d’équilibre pour faire passer correctement les séquences sérieuses entre les séquences loufoques. Mais au final, on pardonne volontiers à Michel Leclerc ce manque de maitrise, bien compensée par la fraîcheur de son film et la grande sympathie qu’il déclenche instantanément.
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