Au bout d'environ trente minutes, le spectateur, un minimum sagace, comprenant l'irrémédiadibilité du désastre, n'a d'autre idée en tête que de s'extirper de la salle obscure. Deux raisons le retiennent toutefois, une primordiale, l'autre prétextuelle : il a payé environ dix euros et il en veut pour son argent (quoiqu'il soit désormais sûr qu'il est floué) ; alors il essaie de chercher un intérêt au film, il se demande bien quelles peuvent être au fond les motivations de ce méchants aux traits hispaniques et qui il peut bien être pour en vouloir à ce point au personnage qu'incarne Will Smith (hélas, environ trente minutes après, l'on sait tout du fin mot de l'intrigue, et l'on ne peut qu'être outré par la grossiereté et la nullité d'un scénario que par euphémisme et par décence je qualifierai de capilotracté).
Ainsi, en rentrant, je consulte Allociné, et je prends connaissance de la note moyenne que les specateurs lui ont accordée (à l'heure où j'écris il obtient : 4,1/5), et je tombe de ma chaise. Puis je réfléchis quelques secondes et je finis par comprendre : les téléspectateurs attirés par un tel film sont, dans une majorité, la niche en direction de laquelle il est adressé ; c'est-à-dire qu'ils ont aimé les deux premiers volets de la franchises réalisés par l'inénarrable Michael Bay et qu'ils sont admirateurs de Will Smith. Une petite poignée de pauvres hères, par aventure, s'est glissée parmi eux pour tuer une soirée.
Voilà alors que tout s'explique : ce public-là n'a pas des goûts très élevés et ne recherche rien tant dans le cinéma que de se divertir au sens pascalien du terme. Je ne leur jette pas la pierre absolument ; j'ai bien conscience que le cinéma est avant tout un spectacle.
Le fait est que les deux premiers films en étaient l'expression la caricaturale, se vautrant dans la fange et l'ignominie. J'ajoute que plus grand monde aujourd'hui ne considère Will Smith comme un acteur de bon aloi. Passé des rôles de petites frappes façon guettos noirs américains, justifiés par la politique des quottas, au bon père de famille, prétri de valeurs morales et puritaines, après être rentré chez les scientologues, il est devenu une caricature de lui-même et de ses plus anciens rôles. Réfléchissez-y : en dehors d'un ou deux films tout au plus, sa filmographie est absolument nulle.
Que nous donne à voir ce nouvel opus où tout est fait pour mettre en vedette Will Smith (tous les autres acteurs sont des ectoplasmes d'opérette destinés à le mettre en valeurs lui et uniquement lui) ? Un personnage interpreté par Will Smith qui oscille entre la racaille de la bouche de qui sort force grossiereté et dézinguant tout ce qui bouge et le bon père de famille, voulant fonder un foyer avec femme et enfants.
En résumé, le scénario est insipide et nul, les dialogues sont lourds, les prestations sont selon les acteurs ou ectoplasmiques ou lourdingues. La réalisation est toutefois sans prétention. Un film que l'on regarde le dimanche les paupières mis-clos devant son ordinateur connecté à Netflix. (Pourquoi a-t-il fait l'objet d'une telle distribution dans les salles de cinéma ?)