Eprouvant et impressionnant en même temps. Arriver à nous tenir en haleine avec une histoire aussi banale, c’est le signe d’une maîtrise sans faille. Un des meilleurs films sur la désillusion que je connaisse. Et un des rares films que j’ai vu ces derniers temps, qui me laisse une impression de maturité du réalisateur. Pourtant il est vieux le film, mais il ne prend pas une ride. Un loser déguisé en cowboy, va à New-York tenter sa chance, et tombe sur un autre loser qui l’entraîne dans sa chute. C’est l’histoire de deux losers. Le coup de génie du réalisateur, c’est son montage à la fois extrêmement « réaliste » et expérimental en même temps, entre fin du rêve américain, et capitalisme triomphant. Un montage qui en a inspiré plus d’un, de Oliver Stone à Darren Aronofsky, et j’en vois même des résurgences dans le Magnolia de P.T Anderson. Un New-York sale et miséreux, loin des images glamour de 90 % des productions hollywoodiennes. La forme très expérimentée, libre et débridée ne l’emporte pas sur l’histoire car le scénario semble s’écrire tout seul, et grâce a un duo d’acteurs dirigés de façon formidable ; John Voigt entre candeur et générosité, et un pur talent, Dustin Hofman. Parler de misère, de prostitution masculine, de fraternité, de rêve d’une vie meilleure sans des tonnes de dialogues, juste avec des flash-back, des anecdotes qui font mouche, des flash-forward ou des prémonitions, des rêves éveillés, des cauchemars issus de cet enfer urbain, tout un attirail cinématographique utilisé à très bon escient. C’est très fort émotionnellement, et ouvertement documentaire dans l’intention. Ici, certaines scènes de la vie courante frappent comme un uppercut. Et ce détour inattendu, par une Party très psychédélique, où nos deux compères volent de la nourriture, et servent de bêtes curieuses chez les bobos de l’époque, ça semble tout con, mais c’est génial. Seule solution, la fuite vers une chimère, le soleil de la Floride, mais…