Ce film produit par Netflix est vendu comme un thriller dans un univers d’anticipation mâtiné de cyberpunk.
Et malgré le budget, le casting américain et allemand et les ambitions artistiques du réalisateur de livrer « son Blade Runner », le film est un échec ahurissant.
En dépit d’images de synthèses de qualité, d’un gros effort sur les décors, voitures, maquillage, jamais ce Berlin futuriste n’apparaît comme réaliste et tangible, tant l’écart est grand entre par exemple des immeubles en béton du futur et un vieil immeuble des années 30-50 en brique au cœur de Berlin.
Symptôme de son échec à plusieurs niveaux, le film accumule les incohérences scénaristiques, les motivations des personnages absurdes et contradictoires.
Le gros du long-métrage consiste en un nombre interminables d’aller-retour entre d’un côté le barman muet Léo qui cherche en vain la femme qu’il aime avec le regard vide, et de l’autre, les deux médecins de la pègre locale qui font leur vie.
Un exemple d’erreur scénaristique : quand vous voyez deux personnages qui ont le même rôle et font la même chose, alors qu’il aurait été plus cohérent et logique de les fusionner en un seul personnage, afin de créer un personnage plus complexe et intéressant à suivre. C’est le cas des deux chirurgiens de la pègre.
Et pour les différencier, il y a
le pervers et pédophile
un peu fragile, et de l’autre la grosse brute qui confie sa progéniture à une maison-close, mais se la joue bon père de famille, et trimballe sa gamine dans les bas-fonds les plus glauques de Berlin.
Vu la manière dont le film est vendu, on s’attend à ce que la narration s’articule sur le seul personnage du barman, qui deviendrait un loser en quête de revanche, cherchant à retrouver sa moitié, et liquidant les gangster et hommes de main au passage.
Mais non, le film préfère perdre sa cohérence et tout forme d’unité, en alternant des scènes avec les deux beaufs américains, ce qui casse toute ambiance et tout le côté thriller hardboiled.
Quand on décide de caster un acteur dans le rôle principal d’un muet, il faut qu’il soit expressif et capable de faire partager ses émotions aux spectateurs, et ce n’est pas le cas d’Alexander Skarsgård, au regard froid et sans âme, plus apte dans des seconds rôles germaniques (oui, il est suédois, et alors, il est acteur, non?).
Un grand réalisateur doit également être capable de diriger un personnage joué par un enfant, et vu l’absurdité des scènes avec la gamine, on sent bien que la très jeune actrice n’a aucune idée de ce qu’il se passe…
Toutes les grandes idées et ambitions personnelles du réalisateur s’échouent, transformant ce film à gros budget en série B fauchée, maladroite et ratée de bout en bout.
Un grand réalisateur reconnaît ses limites et sa capacité créative : si vous ne savez pas filmer une scène de bagarre, faites-la hors-champ.
Si vous ne savez pas écrire un film alternant les points de vue avec des intrigues à tiroir, utiliser une narration centrée sur le personnage principal, avec une grande ligne directrice simple et claire.
Si vous êtes nul en métaphore, n’en faîtes pas! Et faites dire votre message par un personnage secondaire au détours d’une scène.
Si vous ne savez pas diriger des enfants, ne leur donner pas de rôle à texte, la figuration doit suffire. C’est quand même le b-à-ba du cinéma.