"La Taupe" est un film dont la complexité est autant un atout qu'un frein. En effet, en voulant traiter une histoire aussi dense
(le Cirque, le projet Sorcellerie, la guerre Froide, le retour de Tarr, le MI-6, les russes, l'arrivée des américains, les double ou triple agents, les noms de codes, les multiples protagonistes impliqués)
par le biais d'une narration lente, bavarde et pas linéaire chronologiquement
(il y a quelques allers-retours temporels)
, le scénario titille autant les méninges qu'il peine à nous immerger immédiatement dans son propos, à l'image d'un démarrage introductif compliqué (il faut présenter tous les personnages) et d'une première moitié très floue, avant que la suite n'aille en s'améliorant au fur et à mesure que les indices trouvent leurs conclusions. L'ensemble bénéficie alors d'éléments réussis
(les échecs, le faux adultère pour piéger Smiley, l'identité du traître, les ramifications multiples du complot)
et de scènes marquantes
(celle du tarmac est touchante, celle de l'attaque sur Jim est pleine de détails, celle de la fête de Noël est drôle)
, servis par un casting royal (Gary Oldman, Colin Firth, Mark Strong et Benedict Cumberbatch en tête). Sinon, la grande force du film est son ambiance espionnage des années 70 (reconstitution parfaite des décors, des costumes, des voitures et des objets) mélangée à un ton résolument anglais, une atmosphère feutrée saisissante
(très sombre ou grise, avec peu de rayon de lumière)
et une gestion maîtrisée des silences, le tout mené par la réalisation habile de Tomas Alfredson. Au final, si le film pourrait faire l'unanimité sur l'aspect technique (distribution, mise en scène, atmosphère), il ne plaira pas à tout le monde concernant son sujet, et seul(e)s les courageux(ses) qui iront au-delà de l'heure initiale très délicate à appréhender pourront apprécier une intrigue solide et bien conclue.