Pour une de ses dernières performances derrière la caméra, François Truffaut réalise "Le dernier métro", film qui se verra décerné dix Césars l'année suivante (1981). Le même nombre de statuettes que pour "Cyrano de Bergerac" (tourné une dizaine d'années plus tard), tous deux avec Gérard Depardieu.
"Le dernier métro" retrace la vie du Théâtre Montmartre sous l'Occupation. Ce sujet restait un passage obligé pour tout cinéaste d'époque. Et Truffaut n'a pas dérogé à la règle, fort heureusement. François raconte deux histoires : celle des personnages du Théâtre, et celle de la vraie vie. Ces deux histoires s'entremêlent pour n'en former qu'une. Bingo ! Truffaut trouve là un de ses sujets de prédilection, à savoir raconter un fait divers en s'attachant à des personnages de la vraie vie. Encore une prouesse de la part de l'ex-critique des Cahiers du cinéma.
Et de nous toucher en plein cœur par le duo d'acteurs choisi par Truffaut lui-même, Deneuve-Depardieu. Duo pour la pièce de théâtre qu'ils jouent, duo pour l'engrenage de la Résistance dans laquelle Catherine Deneuve est entraînée. Duo aussi pour l'interprétation qu'ils donnent, que ce soit pour le Théâtre Montmartre qui reste l'endroit où le Directeur du Théâtre, juif, peut se tenir caché, que du jeu d'acteurs, qui tient du sans-faute lors des scènes en extérieur. Je peux dire que Gérard Depardieu (retrouvant l'année précédente le metteur en scène qui l'a révélé, Bernard Blier, pour "Buffet froid") tient ici un rôle à fleur de peau car caractérisant à merveille son rôle, celui d'un jeune premier un poil capricieux, mais complètement humain. De son côté, Catherine (vu tout récemment dans "Elle s'en va" d'Emmanuelle Bercot) tient le film sur ses épaules, car elle rentre à merveille dans le rôle de la femme du directeur du Théâtre. Une prestation onctueuse, un jeu d'acteur intense. On vibre avec elle dans les aventures qu'elle cherche à résoudre. Suivent Jean Poiret (pour une fois séparé de son compère Serrault. France 2 a consacré à ce dernier un documentaire "Un jour, un destin" la semaine dernière), très bien dans ce personnage qui reprend le flambeau du Directeur, et Heinz Bennent (dans son rôle le plus mémorable), excellent en directeur de Théâtre juif caché : des seconds couteaux affutés et affutant, tout simplement. Avec aussi les très belles Sabine Haudepin (elle est débutante confirmée sur "Jules et Jim" à seulement 6 ans !!) et Andréa Ferreol ("L'incorrgible" avec Bébel, "Le jumeau" et Pierre Richard, ...) qui se sont exprimées sur France 3 lors de la dernière diffusion du "Dernier métro". Avec aussi Maurice Rish ("La zizanie", "Le gendarme et les extra-terrestres"....) qui apporte toute son énergie comique pour le film. Une troupe impeccable dirigée par Truffaut.
S'ensuit une musique qui a pris des rides car elle fait démodée aujourd'hui. Désolé, Monsieur Delerue, mais je n'adhère plus à vos partitions, qui ont ont pu être d'or pour l'année 1980.
Alors comme tout film, il faut parler de la réalisation. Et là, encore désolé, mais la mise en scène, sans doute minutieuse, n'en n'est pas moins au demeurant classique. François Truffaut soigne sans doute les décors rougeoyants dans lesquels Deneuve s'illustre, mais n'apporte pas grand chose quant au déroulement de l'histoire. Truffaut laisse les comédiens nous narrer des actes héroïques de résistance face à l'Occupation allemande, mais il ne collabore pas à mettre en scène de façon dynamique et énergique son "Dernier métro". Ce qui aurait dû être un chef d’œuvre absolu du cinéma français ne reste qu'un film culte qui reste ancré dans la période des années 1980. Truffaut n'apporte pas son savoir-faire dévorant de classicisme, il s’embrigade dans ce qu'il sait déjà faire, le racontar. Dommage. Vraiment dommage !
Il s'agit ici du moins bon film que j'ai vu de François Truffaut. J'en suis ressorti déçu. Il n'empêche , cela reste un film d'auteur à part entière. Merci François !
A regarder pour une culture cinématographique certaine. Fans de blockbusters, passez votre chemin !