Avec "Délivrance", John Boorman signe un chef d'oeuvre et marque de son empreinte un genre qu'il crée: le Survival. 4 trentenaires, décident de descendre la tumultueuse rivière de Chatooga en canöe, avant que celle-ci ne disparaisse à cause de la construction d'un barrage. Ce qu'ils ne savent pas, c'est qu'autre chose, de bien plus menaçant que des rapides, les attends... En "cassant" le mythe new-age d'une nature idyllique et protectrice, Boorman prend le contre-pied total de l'air du temps. Ici la nature est hostile, menaçante, et ses "rejetons", sont des bouseux de l'Amérique profonde, consanguins, pervers et brutaux. Le mythe du bon sauvage en prend aussi, au passage, un sacré coup! La mise en scène de Boorman, contemplative au début (paysages paradisiaques, scène culte du banjo), devient nerveuse et une violence sourde s'installe progressivement jusqu'à la fameuse scène choc du viol. A partir de ce moment, les héros basculent en enfer, la civilisation ne les protège plus, la morale disparait, seul la survie compte. Le scénario en béton, démontre définitivement que l'homme est un loup pour l'homme. Le casting, notamment Burt Reynolds et Jon Voight est parfait. Mais le véritable personnage centrale du film est la Rivière elle même. Condamnée à brève échéance, elle semble vouloir se venger en tentant d'emporter dans un dernier râle, la vie de quatres citadins un peu trop sûr d'eux et symboles d'un monde moderne empiétant inexorablement sur des espaces encore vierges...
Le film est aussi une confrontation, de l'homme contre la Nature, de citadins contre des ruraux, mais aussi un duel psychologique et moral, un duel intérieur dont chaque personnage ne sortira pas indemne. Grand film d'aventure, référence ultime du Survival, Délivrance se vit comme une expérience, captivante, éprouvante et qui a marqué pour longtemps toute une génération. Un des grand film culte des seventies!