Grand admirateur de Monsieur Paul Thomas Anderson, m'étant enfin procuré le plus rare (sans compter "Sydney", malheureusement introuvable en France) de ses films, je dois dire que ce "Boogie Nights" est une bombe ! Dire que Paul Thomas Anderson n'a que 27 ans lorsqu'il entreprend ce projet hallucinant qui dépeint l'envers du décor du cinéma X sur deux générations. De la gloire des années 1970 à la déchéance des années 1980. "Boogie Nights", c'est avant tout, comme dans toutes ses œuvres, un scénario démentiel, très abouti et réellement captivant. Toujours auteur donc, il livre là une critique aiguë, une fresque ironique du monde du showbizness du cinéma pornographique. "Boogie Nights" est drôle, cruel, dérangeant, totalement cynique, mais aussi d'une beauté hallucinante. En effet, c'est aussi visuellement qu'Anderson prouve tout son talent en livrant une photographie somptueuse et des cadrages audacieux. Possédant les ingrédients du film choral, en suivant les aventures de plusieurs personnages à la fois, la mise en scène est très intelligente. Le montage totalement réussi. Des scènes marquent, comme celle de la première fête chez Jack Horner, dans laquelle le déplacement de la caméra entre tous les personnages est totalement jouissif ou encore l'incroyable enchainement, très bien pensé et carrément dérangeant, des chutes, des descentes aux enfers des personnages dans la deuxième partie. Deux parties scindent en effet le film : une première sur l'ascension et la période de gloire, une deuxième, très sombre, sur la déchéance, physique, morale et sociale. Construction que l'on retrouve d'ailleurs dans "There Will Be Blood". On y retrouve ses thèmes principaux, comme la famille, ses rapports difficiles, la famille, aussi à l'instar de l’industrie, on y retrouve son style, celui proche d'Altman, celui du film choral, on y retrouve aussi son excellente direction d'acteurs, car "Boogie Nights", c'est aussi ça, un grand panel d'acteurs époustouflants. Wahlberg tient par ailleurs un des meilleurs rôles de toute sa carrière, et Burt Reynolds est très troublant en réalisateur porno renommé. La dernière scène est une idée de génie, l'"objet" central, cause de toute cette histoire, caché pendant une heure et trente minutes, est enfin dévoilé ! Un mot sur la bande originale tout simplement excellente, que ce soit dans les morceaux sélectionnés ou dans la composition. Au final, "Boogie Nights", le deuxième (et à ce jour sûrement meilleur) film d'Anderson est une œuvre brillante et mémorable qui dresse le plus intéressant et le plus intelligent tableau de l'univers de la pornographie, et qui a définitivement une allure de chef d’œuvre du cinéma contemporain.