Ang Lee n'aura jamais autant mis en avant des obsessions sexuelles que dans Ice storm, qui se range immédiatement parmi ses meilleurs films. La puberté, les pulsions qui agitent la libido des ados, voilà le thème principal du film. Les hormones nous rongent jusque dans la mort, une fois qu'elles ont commencés. Les adultes, sous leurs apparences raisonnable, sont eux aussi poursuivis par leur désir sexuel, ils couchent entre voisins, ils organisent des « soirées portes clés » pour qui meurt d'envie de tester les partenaires des autres...seulement des années d'expérience leur permettent d'afficher des masques et de cacher leurs sentiments suivant « les normes ». Alors que les gosses, eux, se font choper illico. Pas de chance hein, surtout qu'ils ont l'air d'avoir plus de mal encore à se contrôler que les adultes. Mais ceci ne constitue que la première partie d'Ice storm. Les adultes, en fait, n'excellent pas davantage que les jeunes dans les activités qui les soumettent. La longue soirée organisée par des amis pour la Thanksgiving tourne lentement en cauchemar pour certains, car c'est l'heure où les amours se rencontrent et se séparent, où ils sont tous réunis, où le changement plus ou moins brutal occulte la routine quotidienne qui se répète inlassablement. Les tensions éclatent avec froideur, dans le silence et les regards glacials, telle une « Ice storm » métaphorique. Les jeunes, qui brûlent sous leurs désirs, qui sont souvent ridicules par leur manque de classe, d'expérience, par leur tâtonnements, par leurs impulsions spontanés qui explosent au grand jour sans qu'ils parviennent à les maîtriser, s'en tirent globalement mieux. Avec plus de bonheur (l'espoir naît pour celui qui n'ose pas, l'amour s'arrange avec le frère présent) et plus de malheur. Ce dernier n'est pas la mort lente qui accable Ben, c'est une mort réélle, tragique, qui jette tout ses péchés à la face de l'Homme, qui ne peux que regretter et pleurer ses fautes, son manque d'intégrité. La religion n'est d'aucun secours, puisqu'elle est incarné par des Hommes à la recherche de brebis à féconder. Une œuvre sombre et finalement triste, avec quelques longueurs mais souvent intense. Les dernières minutes amènent les larmes pas bien loin des yeux, devant un tel gâchis, devant le résultat du chaos de cette nuit orageuse. Ajoutez à cela une musique rare qui sonne juste, une poignée d'acteurs excellent (hum, quelques futures stars à leurs début, comme Tobey Maguire et Elijah Wood, sont franchement très gnangnan mais à part ça...) et une photographie somptueuse. Ice storm est un film qui va jusqu'au bout de son sujet, non embarrassé par un vague désir d'enrober le tout au moyen de paysages fabuleux. Le plus psychologiquement abouti des œuvres d'Ang Lee.