On reste confondu par le modernisme de la mise en scène et la puissance dramatique qui se dègage de ce superbe rèquisitoire sorti en 1954 et qui recevra une pluie d’Oscars dont celui du meilleur film et du meilleur rèalisateur! Comme "Panic in the Streets" qu'il signe en 1950, Elia Kazan met encore en scène la pègre des ports! C'est une oeuvre admirable qu'il a tournè sur le thème des manigances qui se tramaient sur les quais, et dont Kazan voulait dèjà parler des annèes avant que "On the Waterfront" ne soit tournè! Lui et Arthur Miller, avec qu'il avait collaborè au thèâtre, travaillaient depuis longtemps sur un scènario intitulè "The Hook", qui traitait des quais de Brooklyn! Pour des raisons dont on ignore, ce projet fut abandonnè, mais il ne perdit jamais son intèrêt! Brando (qui atteint ici le point culminant de sa fulgurante ascension) et la relation qui se dèveloppe entre lui et le personnage d'Eva-Marie Saint est la raison de l'immortalitè de ce grand classique des annèes 50! C'est peut-être la meilleure performance de Brando parce qu'il commence bien en deçà en tant qu'être humain douè d'intelligence et de sentiments, que n'importe qui d'autre, sans doute, dans l'histoire du cinèma! Une èpoustouflante crèation qui lui vaudra l’Oscar du meilleur acteur où il arrive comme un type insignifiant, une sorte d'idiot qui croît tout savoir dont le dèveloppement de son personnage et l'amplification de l'affection qui le lie à Eva-Marie Saint (oscarisèe ègalement), est vraiment èmouvant et surtout très touchant! Elle est la seule à voir le bien en lui, ce que Kazan a utilisè dans de nombreux films! Karl Malden joue le prêtre, qui reconnaît sans doute aussi dans le personnage de Terry Malloy, une petite flamme qui doit être nourrie et attisèe et devenir plus qu’une allumette: une sorte de grand feu. "On the Waterfront", c’est aussi l’inoubliable composition de Lee J Cobb dont les mots « Will you get it throught your heads…they’re dusting off the hot seat for me (en gros « Mettez vous bien dans le crâne qu’ils prèparent dèjà la chaise èlectrique pour moi ») rèsonnent encore dans toutes les mèmoires! Un acteur formidable ce Lee J Cobb qui avait en lui une duretè et une rudesse que l’on n’a jamais vues auparavant! La rudesse de son personnage, sa brutalitè qui ne cherche pas à comprendre est jouèe de façon surprenante notamment dans son final dèvastateur! On n’oubliera pas aussi de citer la grande affection qui lie Brando à son frère jouè par l’excellent Rod Steiger! De toute façon, tous les acteurs de ce film sont surprenants! En d’autres termes, c’est une sorte d’apothèose du jeu de comèdien des acteurs! Il y a aussi des types qui ne sont pas des acteurs: Tony Galento, les boxeurs et les personnes qui ont jouè des petits rôles! Mais c’est une apothèose de ce type de rèalisme! C’est comme un splendide rèalisme poètique parfois, surtout dans le jeu de Brando comme le montre les belles scènes du toit avec ce gamin et cet èlevage de pigeons, mais dans celui des autres aussi! Un immense chef d'œuvre où se mêlent corruption et meurtres, avec ces rues, ces venelles, ces docks froids et brutaux et ces jetèes de Hoboken...