Le film a sans doute perdu en efficacité en cinquante ans. Il est pompeux, sirupeux, théâtral, (très) cucul, et la façon dont le réalisateur traite de l'homosexualité peut aujourd'hui paraître désuète. Mais ces défauts ne cachent que partiellement la grandeur de ce film. Au niveau de la mise en scène tout d'abord. Wyler, grâce à une utilisation brillante des éclairages, sublime tout ce qu'il a devant lui. Et sublimer Audrey Hepburn, déjà magnifique (elle crève l'écran, dans un rôle dans lequel elle nous fait découvrir beaucoup de sensibilité), il faut le faire. Ce noir et blanc est vraiment profond, il donne carrément une autre dimension au film... Grandeur qui s'exprime également au niveau de la narration, très fluide, ce qui fait que l'on ne s'ennuie jamais, d'autant que la descente morale des principaux protagonistes, très progressive, est plutôt bien amenée. Et il y a aussi ces personnages, tous très crédibles, justes, réels, et cette musique douce et lyrique, qui fait que le film n'est que plus beau et triste, jusqu'à une conclusion très amère où le réalisateur dénonce violemment la cruauté et l'égoïsme humain... Et puis, je ne sais absolument pas pourquoi, mais les décors m'ont touché, ces maisons et ces arbres, comme s'ils avaient un caractère propre. Étrange, je ne saurais en expliquer la raison... La seule chose dont je suis sûr, c'est que "La rumeur" est bien beau film.