Manhattan est peut-être le film le plus connu de Woody Allen ou, à tout le moins, son film le plus iconique. Quel cinéphile n’a pas à l’esprit ce plan superbe de ce couple assis sur un banc avec Queensboro Bridge en toile de fond ? Considéré comme l’un des bijoux de la filmographie du maître (avec "Annie Hall", "Hannah et se sœurs" ou encore "La Rose pourpre du Caire"), Manhattan est une incontestable réussite, pour peu, bien sûr, qu’on soit sensible à son style. Car, mine de rien, le film ne s’avère pas si abordable que ça et suppose, si ce n’est une certaine concentration, au moins un certain intérêt pour l’œuvre de Woody Allen. Car tous ses ingrédients habituels y sont réunis et transcendés, de ses névroses obsessionnelles à ses réflexions philosophiques, en passant par l’amour des longues pages de dialogues et les plans séquences, le questionnement sur le couple et l’amour ou encore la quête d’un certain absolu... le tout asséné avec son incontournable sens de l’humour et une beauté formelle sidérante. Le choix de filmer New-York en noir et blanc apporte un charme fantastique à un film qui se veut, par ailleurs, déjà très arty au vu du milieu dans lequel évoluent les personnages. Manhattant est, d’ailleurs, une superbe déclaration d’amour à la Grosse Pomme (ce n’est pas la seule dans la filmo du maître) et, plus généralement, une invitation à un voyage gentiment mélancolique sans être ennuyeux ou austère. Woody Allen démontre, une fois de plus qu’il est un formidable directeur d’acteur puisque, outre sa propre prestation toujours extraordinaire de drôlerie (même si son côté "tombeur" peut laisser perplexe), on retrouve sa muse préféré Diane Keaton, formidable en bobo hautaine, Mariel Hemingway est incroyable en jeune conquête au timbre de voix si particulier, Michael Murphy est amusant en meilleur ami cocufié et la jeune Meryl Streep surprend en ex insupportable de rigueur. Certes, le film aurait gagné à parfois moins se perdre dans son rythme et dans son propos, le dernier tiers ayant tendance à être un peu trop redondant. Mais, pour le reste, "Manhattan" est vraiment un très joli film, caractéristique du style de Woody Allen dont on ne peut que comprendre la place privilégié qu’il occupe dans sa filmographie et dans le cœur des cinéphile.