Vingt ans après la première adaptation signée Don Taylor, revoici le docteur Moreau et ses créatures dans un remake bienvenu cette fois-ci réalisé par le brillant John Frankenheimer, remplaçant le désisté Richard Stanley (auteur du remarqué Hardware). Hélas, ce troisième passage "officiel" sur grand écran a subi des déboires de production plutôt impressionnants qui vont se voir indubitablement à l'écran. En premier lieu, la production souhaite conserver deux des plus insupportables acteurs qu'il soit : le décérébré Marlon Brando et le colérique Val Kilmer, alors dépressif depuis sa récente rupture avec Joanne Whaley. Capricieux jusqu'au bout des doigts, absents du tournage ou auteurs de demandes de plus en plus ridicules, les deux stars vont mener la vie dure à Frankenheimer et son équipe, en particulier la troisième vedette du film : le brillant David Thewlis, ici finalement peu appliqué, qui remplace l'originellement prévu Rob Morrow. Tout avait l'air de pourtant marcher : le casting est solide, les décors magnifiques tournés dans la forêt tropicale du Queensland, les effets spéciaux de qualité, les impressionnants maquillages signés Stan Winston et le scénario fidèlement reproduit tout en y apportant les modifications du film de 1977 et un nouveau décor situé en 2010. Ces changements s'avèrent contre toute attente bienvenus et en parfaite adéquation avec le sujet de modifications génétiques. La mise en scène du réalisateur de Black Sunday reste dynamique et soignée, certaines séquences étant très réussies. Hélas, dans l'ensemble, le résultat final est très décevant, principalement du à la nonchalance des acteurs, au look excentrique de Brando totalement ridicule en Moreau habillé comme une folle, tout de peinture blanche maquillé, ainsi qu'à quelques baisses de rythme malencontreuses. Le film conserve toutefois ses qualités, à savoir une certaine horreur dans ses propos et un degré de malaise bien retranscrit à l'écran. Ainsi, L'île du Dr. Moreau n'est pas la meilleure adaptation du roman de H.G. Wells, voire la pire, mais ne reste pas foncièrement désagréable. Le film laisse juste un amère goût d'inachevé et de déception, la production chaotique du film et le trop plein d'implication grotesque d'un Marlon Brando au bord de la folie après le suicide de sa fille n'ayant pas rendu la chose facile.