Si l'homme à la caméra m'avait laissé quelque peu septique, en effet, si j'ai apprécié comme tout le monde la technicité folle et l'inventivité de Vertov, et même sa volonté d'expérimenter pour expérimenter, je n'avais pas adoré, j'ai trouvé que ça manquait de lien, d'unité. Mais c'est sans appréhension particulière que je regarde ce Tri pesni o Lenine.
Le fil est divisé en trois "chansons", enfin chansons c'est vite dit vu que ça ne chante pas des masses, une faisant l'éloge de Lénine, ce grand homme qui a mis la Russie en marche, un second sur la tristesse engendrée par sa perte pour tout un peuple (et même au delà des frontières de l'URSS), et la troisième sur l'immortalité de Lénine, et comment ses idées, ses pensées lui survivent.
Et je dois dire que je suis simplement conquis. Ils en avaient des auteurs de propagandes en URSS, entre Vertov, Eisenstein, Medvedkine, il y a de quoi faire (et peut-être d'autres encore).
C'est simplement brillant, si ça expérimente moins frontalement que l'homme à la caméra, ça expérimente pas mal également, mais là c'est au service de l'éloge du camarade Lénine, du coup le tout prend un sens, on est plus dans l’expérimentation un peu gratuite, ça sert à montrer la grandeur de Lénine.
Si j'apprécie le procédé, la démarche est un peu l'inverse de celle de l'évangile selon saint Matthieu de Pasoloni, qui lui transformait le sacré en Lénine, ici c'est Lénine qui devient le sacré. Après je ne suis pas certain que cette glorification à outrance d'un homme soit très marxiste dans l'âme.
En tous cas c'est un film sublime, avec une musique très bien choisi et qui arrive à émouvoir, dur de ne pas être touché lorsque l'on voit ce Lénine mort, et les gens pleurant autour de lui tout en entendant la marche funèbre, et ceci sans tomber dans le racolage pour tirer des larmes coûte que coûte.
C'est vraiment un grand film.