Un an après "Roma, città aperta", Rossellini livrait un second volet sur le bilan ravageur de cette Seconde Guerre Mondiale. Tourné durant l'été 1947 à Berlin, "Germania, anno zero" évoque, comme son nom l'indique, le point de vue Allemand, sans prendre parti pour qui que ce soit. Le principe est le même : faux documentaire, mais véritable description sociale. Le tout dans le style le plus radical possible, c'est-à-dire un néoréalisme sec. L'image n'est pas toujours nette, les éclairages naturels ne donnent pas lieu à l'esthétique que l'on peut acquérir en studio, mais peu importe : l'essentiel est dans le propos. De ce point de vue-là, c'est absolument remarquable. Objectif, désirant formuler un message d'espoir au milieu de toute cette misère, celui-ci finira comme noyé sous les trop nombreuses décombres. Rien n'est perdu, semble-t-il dire, mais il va falloir que cela change car le constat est édifiant. Pas de recul, constituée d'interrogations qui touchent le spectateur avant le réalisateur, l'oeuvre est résolument pessimiste. Si "Roma, città aperta" ne m'avait que partiellement convaincu, "Germania, anno zero" est à mes yeux d'un tout autre niveau. Plus dur mais ne s'embarquant dans aucune longueur, il ne développe que ce qui est favorable à l'ensemble. Les protagonistes les plus passionnants sont ainsi révélés à pleine lumière tandis que d'autres nous paraissent plus mystérieux. Finalement, on se rend compte que notre impression devient celle des habitants eux-mêmes : avec leurs joies, leur craintes, leurs familiarités ou au contraire les personnes inconnues qui défilent... On rentre complètement dans ce voyage terrifiant, ressortant complètement sonné et abasourdi par la conclusion. La seule chose que l'on pourrait reprocher à ce film remarquable, c'est d'abuser de son style, de se complaire de ce qu'il décrit. Enfin, cela n'engage que moi...