C'est évident : Barbet Schroeder n'est pas manchot, et ses films ne ressemblent en général pas aux autres. « Tricheurs » n'échappe pas à ce constat, l'étonnant développement de l'intrigue et l'aspect marginal des deux héros étant palpables rapidement. Hélas, si cela fonctionne parfois (« Maîtresse »), c'est moins le cas ici. Certains éléments ont beau être séduisants et quelques rebondissements bien venues, difficile de s'intéresser à des personnages aussi médiocres, leur relation « passionnelle » ayant quelque chose de gonflant, presque obscène. Vous me direz, les gens inintéressants vont bien ensemble, mais il y en a déjà assez dans notre quotidien pour qu'on se les tape au cinéma ! Ils sont même pires : mesquins, étroits... Je veux bien que ces derniers soient aveuglés par leur passion du jeu, mais j'ai quand même bien du mal à être compatissant. De plus, si beaucoup s'extasient sur la nonchalance légendaire de Jacques « je vous emmerde tous » Dutronc, cela me gonfle plus qu'autre chose, tandis que Bulle Ogier a au moins le charme, la fraîcheur pour elle, nous donnant surtout l'impression d'avoir très mauvais goût en matière d'hommes... Heureusement, le réalisateur a un certain brio pour filmer les scènes de casino (toutes remarquables), et il faut avouer que tout cela est doté d'une certaine personnalité, m'enfin... A l'image d'un dénouement crédible mais sans la moindre morale (dans l'absolu pourquoi pas, mais là, c'est juste trop), on se dit que l'œuvre ne nous a finalement pas apporté grand-chose, ni en mal ni bien. Pas mauvais donc, mais pas vraiment bon non plus...