Sympathique reprise de ce joli film de Jacques Doillon sorti en 1996 dans une petite salle de quartier à Tokyo. Ponette, 4 ans, pleure. Elle pleure sa maman disparue subitement dans un accident de la route. Elle vient de perdre sa seule source d'amour et d'affection. Ponette ne s'y résout pas, persuadée que sa maman va revenir. Entre un père brutal et matérialiste pour lequel la mort de sa femme semble être un non-évènement (l'histoire ne le dit pas, mais tout laisse à croire qu'il avait déjà refait sa vie avec une autre femme) et des enfants de son âge qui restent indifférents à son malheur et souhaitent l'initier à des jeux toujours plus créatifs (apnée dans le bac à ordures, épreuves à passer pour devenir enfant de Dieu...), Ponette se trouve face à un mur d'incompréhension. Deux personnes font toutefois preuve d'empathie à son égard : sa tante, affectueuse et attentive, qui lui raconte l'histoire de Jésus, et l'éducatrice du centre aéré, qui lui montre la chapelle attenante et lui apprend à prier. Ponette découvre progressivement l'importance de Dieu jusqu'à croire que lui seul est à même de la remettre en contact avec sa maman disparue.
A travers ce film, Jacques Doillon a choisi de faire parler des enfants de 4 à 6 ans du thème de la mort. Sacré défi. En leur faisant associer le plus souvent la mort à la religion dans leurs dialogues, il réussit son pari. Pour les enfants de l'âge de Ponette, les morts montent en effet au ciel pour rester aux côtés de Dieu. C'est ce que leur expliquent les adultes. Les entendre échanger leurs connaissances et leurs croyances en matière de religion avec leurs mots à eux donne une force réaliste incroyable à l'ensemble. On retiendra notamment la jolie scène où la cousine de 6 ans explique à Ponette puis à son petit frère en quoi Catholiques, Juifs et Arabes sont différents.
Autre caractéristique du réalisme saisissant du film : les enfants que nous montre Doillon cherchent bien davantage à dominer l'autre intellectuellement ou physiquement qu'à faire preuve de compassion et de solidarité les uns envers les autres. C'est généralement ce qu'on observe chez les enfants avant qu'ils n'atteignent l'âge de raison : le bien et le mal, l'équité et la justice sont des notions qui leur sont encore étrangères. En ne croisant que des enfants de son âge, Ponette a d'autant plus de difficultés à faire son deuil. En tant que spectateur adulte, on aurait simplement envie de la prendre dans ses bras, de la consoler et de lui apporter toute l'affection et l'écoute dont elle a besoin. La brutalité du monde dans lequel la fait plonger la mort de sa mère et que vient renforcer l'attitude de son père (qui la traite presque comme une adulte en la faisant monter devant en voiture, en évoquant sa « conne de mère » ou lui demandant s'il va pouvoir se démerder avec elle) n'est pas faite pour elle. Ponette persiste à croire à la pensée magique.
Cette pensée magique qui lui permettra in fine de pouvoir renouer un contact spirituel avec sa maman et d'obtenir d'elle son conseil d'aspirer au bonheur comme un passeport à la vie qui s'ouvre devant elle.
Le film se termine par le joli sourire de Ponette décidée à vouloir être heureuse, son seul sourire du film, et par un dernier plan montant sur un énorme marronnier, dont les branches s'élevant vers le ciel symbolisent le lien entre la terre et le ciel, le lien entre les vivants et les morts.