Si les 7h30 de Satantango auraient de quoi déstabiliser, le film est tellement riche et puissant dans le moindre de ses scène que le spectacle finit par prendre et par scotcher complètement, même au delà de la simple hypnose, il gagne en force et en émotion à mesure que la fin approche, et finit par un coup de grâce d'un grande simplicité mais d'une évocation splendide sur la vie.
L’œuvre se pare d'une esthétique grisâtre, Tarr, fidèle à son noir et blanc embourbe un petit village sous des pluies d’automne et de brouillards mystérieux, introduit l'arrivée de quelques personnages dans une petite communauté qui va alors tenté de gagner sa vie en travaillant. Film certes politique, puisque c'est bien du communautarisme dont on annonce la fin, mais aussi, sur le tard, une grande œuvre sur le travail d'écrivain, de créateur, avec ce personnage de docteur qui se reclus chez lui et s'isole pour se fermer de la lumière, de la vérité, s'enfermer dans ses pensées et retrouver la voix du narrateur.
Le film est parcouru comme un grand roman d'intrigues plus ou moins reliées, de dialogues très variés et de situations qui dépassent le simple cadre du film, tant le travail sur le plan par plan du réalisateur emmène chaque idée à son bout, et fait imploser l'écran à certains moments particulièrement forts (scène de danse, scène avec le chat, fuite des chevaux... Tout prends une importance et une beauté lyrique capitale, tant le film offre beaucoup de chose avec peu de moyen. Il se créer une belle attente de chaque nouvelle action, et même des surprises assez plaisantes, qui éloignent le film d'un cadre purement classique que Bela Tarr aurait pu faire : il faut voir comment il film chaque personnage avec plaisir, avec humanité et grande simplicité, comment il les filme en interactions, dans le mouvements de leur danse, de leurs disputes et surtout, ce qu'il fait du décor, cette campagne en ruine de la vie où teintent les cloches d'un invisible glas ("serais-ce la fin des temps ?").
Le film, même si son propos est tout sauf joyeux, a une réelle énergie par moments qui en font une parabole sur la vie de villageois et de travailleurs sublime, qui dépasse de loin toutes les autres représentations plus ou moins réalistes de ces conditions de vie. Ici, la caméra est là, le regard sur l'enfance, la présence de la nature, des animaux en liberté, la puissance de certains symboles religieux oi naturels et un humour assez noir et acerbe (scène de description des villageois par les eux hommes de bureau) font de l'ensemble une des plus grandes œuvres de son époque, hanté par les sons d'une fin de quelque chose, d'une alerte permanente.