Le Japon médiéval en proie aux guerres intestines entre empereurs. Une femme et sa belle fille, dans l’attente du retour du fils (et mari), survivent dans une petite masure perdue au milieu des roseaux en assassinant et dépouillant les soldats égarés. Un jour, un compagnon de lutte du fils attendu revient et leur annonce la mort au combat de celui-ci. Cette arrivée va perturber le quotidien de ces deux femmes, déchaînant leur désir et leurs pulsions sexuelles. Très librement adapté d’un conte bouddhiste, Onibaba de Shindo brille par la qualité de sa réalisation et la beauté de ses images. Selon moi, le film est une très belle réussite sur 3 niveaux : le lieu où se joue le drame, l’érotisme suggéré, et le travail du son. Ainsi, l’ensemble du film se déroule dans un environnement primitif : une vaste et dense étendue de roseaux en bordure de rivière, filmée sous tous les angles et sous toutes les conditions (jour/nuit, soleil/tempête) par Shindo, et donnant lieu à chaque fois à de superbes images. Les seuls plans nous offrant un autre décor sont des plans sombres d’intérieurs exiguës (les masures, la caverne du receleur) et les plans à l’intérieur de la fosse, fosse éminemment symbolique, qui renforcent l’ambiance ténébreuse du film. Loin du spectacle érotico-voyeuriste vulgaire, Shindo parvient finement à saisir les pulsions sexuelles de ses personnages et à faire affleurer l’érotisme à la surface de scènes anodines, en utilisant subtilement les éléments (l’eau, le vent). Le travail du son, très riche, mélange de percussions et de sons naturels exacerbés, colle parfaitement à la mise en scène du film. A noter également la beauté des scènes flirtant avec le fantastique (je pense au masque de démon), réellement inquiétantes et visuellement époustouflantes. En résumé, un très bon film de Shindo, s’ouvrant à différents niveaux de lecture, et porté par une réalisation de haute tenue. A découvrir.