difficile pour moi de ne pas y voir l'improbable passerelle entre "Blade Runner" et "2046", tant la composition -visuelle évidemment, mais aussi philosophique- oscille entre les deux... du coup, et même s'il transcende les qualités de BR en tous points, il se trouve un peu oblitéré par 2046...
reste que sa trame en est fondamentalement plus simple, car centrée sur les rapports humains-cyborgs...
première originalité : les humainormés (MP citoyens tel Noma) semblent plus artificieux que les cyborgs-de-combat (tel Cyper et la Kamikaze)... Ainsi, les machines indifférencient le combat, confusion emphatisée par la saturation de l'esthétique mixant les gaz et les liquides, les sons et les bruits, en diverses couleurs profondes...
conséquence : les "déviants" (qu'ils soient humains ghettoïsés ou cyborgs défectueux) sont dans l'excès ou l'épuisement... pour le dire autrement : ils se retrouvent désespérément dans le trop et le pas assez, le trop tôt ou le trop tard, et finalement seuls face à la mort...
seconde originalité : le problème de l'Autre, traitée polyfocalement (et c'est la plus grande force du film, la seule qui aille à l'encontre de la mélancolie)... Giro sait ce qu'il veut, il est toujours dupe de l'immortalité, c'est un proxénète virtuel, en quête de corps... à l'inverse, Zion erre, elle n'est pas dupe, croit à la mort, c'est une prostituée réelle, en quête de coeur... le passage de l'un à l'autre ne se fera pas : fail. C'est cet échec qui peut expliquer les autres, l'impossibilité du rapport (R est le dernier fragment mémoriel de R-I-a, avant qu'elle sombre dans l'Avalon post-exotique, Koyo, île de l'oubli : l'autre Autre est bien le lien entre I et a qui s'est défait), la solitude de tous (rompant le dernier lien : celui entre R et I, par l'explosion du QG machinique)...
conséquence : l'oxymore apparent du titre apparaît à la fin davantage comme une juxtaposition asymptotique, comme les deux déesses... manquerait-il un dieu ? un homme ?
mais Zion vit enfin