Alors voilà à quoi ressemble le nouveau né des créateurs de l’Age de Glace… Le défi était osé de faire aussi bien, surtout avec un oiseau comme personnage principal, pas forcément l’animal le plus touchant ou le plus apprécié des enfants. Et bien, le pari est réussi, tout du moins en partie, car même si Rio ne se hisse pas au niveau de l’Age de Glace (ou des productions Pixar), il n’en reste pas moins un très bon divertissement. Ce long métrage est agréable à regarder, il est très coloré et lumineux, c’est d’ailleurs son atout majeur. On assiste à un déluge de couleurs et d’images toutes plus belles les unes que les autres dans une ville de Rio plus vraie que nature (le choix du Brésil comme lieu de l’action est vraiment très judicieux). Techniquement, Rio joue donc dans la cour des grands et n’a rien à envier aux productions Pixar. La 3D est pour le coup utilisée avec justesse, elle offre une belle profondeur au champ de vision et amplifie les nuances de couleurs dans les scènes de danse ou de carnaval par exemple.
Par contre, là où Rio marque le pas par rapport aux références du genre made in Pixar, c’est vraiment au niveau du scénario, de l’émotion, des personnages en eux-mêmes. Même si l’histoire est plutôt originale et bien emmenée, et que les premières minutes reprenant la vie du héros dans son milieu apprivoisé sont très belles et touchantes, on bascule vite dans du classique et un manque d’originalité dommageable…pour finir avec une épilogue trop rapide. Le personnage principal, Blue, est parfois drôle, mais il ne restera pas dans les annales des personnages d’animation les plus marquants. Il est en fait trop classique dans ses attitudes et son caractère, et le doublage en français ne l’aide pas à se démarquer (les voix de Lorant Deutsch et Laetitia Casta ne vont pas du tout…selon moi). En fait, il manque un personnage vraiment inoubliable, ici personne ne sort du lot (peut être le chien baveux et encore…) et le mix humain – animaux ne permet pas au film de livrer toute sa qualité. Parfois le mariage des deux porte ses fruits (Ratatouille), mais généralement il est préférable de se cantonner à un type de personnages, surtout que dans Rio, ce sont les humains qui sont le plus souvent les plus drôles (les deux méchants idiots, le couple naissant cucul…) alors que ce devrait être les oiseaux. L’humour est néanmoins présent dans le film, même si l’on sourit plus qu’on ne rit. Contrairement à l’Age de Glace qui faisait davantage penser à un délire de créateurs qui cherchaient avant tout à se marrer (Scrat, Sid…), Rio s’avère plus sage, les dialogues étant souvent (trop) lisses et respectueux…dommage car le cadre du carnaval aurait pu se prêter à des dérives tellement plus abouties et drôles. Dernière chose, la musique est très entraînante, elle est parfaitement dans l’esprit du film et du décor brésilien, voir les oiseaux danser est vraiment drôle mais elle coupe un peu le rythme général du film en étant surexploitée.
En résumé, un film d’animation réussi visuellement surtout, puisqu’il plonge le spectateur dans un Brésil brillant de mille feux aux couleurs du carnaval, mais un peu décevant dans son histoire et son émotion. Et oui, compte tenu des dernières perles de Pixar, Blue Sky va être dans l’obligation de se transcender en exploitant mieux les ingrédients qui ont fait le succès de l’Age de Glace, s’il veut ne pas se laisser distancer par le géant de Disney.
Auteur du livre "Guide de Survie du Cinéphile Amateur" (sortie janvier 2019)